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Rapport | Doc. 12813 | 09 janvier 2012

Le respect des obligations et engagements de la Serbie

Commission pour le respect des obligations et engagements des Etats membres du Conseil de l'Europe (Commission de suivi)

Corapporteur : M. Davit HARUTYUNYAN, Arménie, GDE

Corapporteur : M. Indrek SAAR, Estonie, SOC

Origine - Renvoi en commission: Résolution 1115 (1997). 2012 - Première partie de session

Résumé

La commission de suivi félicite la Serbie pour les progrès significatifs accomplis depuis l’adoption de la Résolution 1661 (2009) de l'Assemblée parlementaire. La commission reconnaît que la Serbie a rempli un grand nombre d'obligations et d'engagements et réalisé des progrès considérables, notamment dans le domaine de la coopération régionale et de la coopération avec le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, tout en poursuivant le dialogue avec Pristina par des moyens pacifiques et diplomatiques. Des efforts méritoires ont été accomplis par la Serbie pour réformer la loi électorale et le système judiciaire, lancer le processus de décentralisation, accroître la protection des droits des minorités et mettre en place et consolider des instances de contrôle indépendantes. La Serbie a ratifié un grand nombre de conventions du Conseil de l'Europe et est résolue à poursuivre sa progression vers son intégration dans l'Union européenne.

Cependant, en vue de clore la procédure de suivi, la commission estime que les autorités serbes doivent accomplir des progrès additionnels pour adopter la législation nécessaire et en assurer la mise en œuvre effective dans quatre domaines essentiels: la mise en place d'un système judiciaire indépendant et efficace, des médias indépendants, la lutte contre la corruption et la lutte contre les discriminations.

La commission recommande donc que l'Assemblée continue sa procédure de suivi en ce qui concerne la Serbie et encourage le parlement et le gouvernement issus des élections législatives de 2012 à accomplir des progrès supplémentaires dans les quatre domaines essentiels mis en évidence par la commission.

A. Projet de résolution 
			(1) 
			Projet
de résolution adopté à l’unanimité par la commission le 15 décembre
2011.

(open)
1. L’Assemblée parlementaire rappelle sa Résolution 1661 (2009) sur le respect des obligations et engagements de la Serbie. Elle se félicite des progrès considérables de la Serbie, ces deux dernières années, dans le sens du respect des normes et des règles établies par le Conseil de l’Europe en termes de respect des obligations et engagements contractés lors de son adhésion au Conseil de l’Europe, en 2003. L'Assemblée félicite la Serbie pour la stabilité politique obtenue ces dernières années, les progrès qu’elle a accomplis, ses efforts en vue de son intégration dans l'Union européenne et sa coopération avec le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY).
2. Le renforcement des institutions démocratiques et des droits de l’homme, la réforme de la justice et du ministère public, la lutte contre la criminalité et la corruption et la situation des médias sont autant de domaines inscrits dans la politique de l’Etat qui devraient rester prioritaires dans les années à venir. Dans ce contexte, l’Assemblée se félicite de la présentation, par le Parlement serbe, d’une feuille de route pour la mise en œuvre des obligations et engagements statutaires, conformément à la Résolution 1661 (2009), qui a permis de mesurer les progrès réalisés et de déterminer les engagements non encore accomplis.
3. Concernant la coopération régionale:
3.1. L’Assemblée reconnaît le rôle constructif et positif que peut jouer la Serbie pour stabiliser la région et se félicite des mesures prises par les autorités serbes pour renforcer leurs relations avec les pays voisins. L’Assemblée souhaite notamment souligner le rôle du parlement dans ce processus, et l’adoption, par l’Assemblée nationale serbe, le 31 mars 2010, d’une déclaration condamnant les crimes commis à Srebrenica. L’Assemblée encourage les autorités serbes à poursuivre leur politique étrangère dans le sens du renforcement du dialogue, de la réconciliation et de la coopération dans la région – notamment vis-à-vis du Monténégro, de la Bosnie-Herzégovine et de la Croatie, à maintenir le dialogue et à promouvoir des relations de bon voisinage, fondées sur le respect de la souveraineté des pays voisins.
3.2. L’Assemblée salue les efforts déployés par la Serbie en vue de réactiver la recherche de solutions à long terme en faveur des réfugiés et des personnes déplacées – initiative lancée à Sarajevo en 2005. L’Assemblée se félicite également de la signature, le 14 novembre 2011, d’une déclaration conjointe des ministres des Affaires étrangères de la Serbie, de la Bosnie-Herzégovine, de la Croatie et du Monténégro, en vue de définir des mesures concrètes permettant de lever les obstacles à un règlement durable de la question du retour des réfugiés et des personnes déplacées, et demande instamment à la communauté internationale de soutenir ce processus dans le cadre de la Conférence des donateurs prévue en 2012.
4. Concernant la coopération entre la Serbie et le TPIY:
4.1. L'Assemblée félicite les autorités serbes d’avoir procédé à l’arrestation de deux fugitifs accusés de crimes de guerre – Ratko Mladić, en mai 2011, et Goran Hadžić, en août 2011 – et à leur extradition auprès du TPIY; l’Assemblée est fermement convaincue que ces arrestations contribueront à rendre justice aux victimes de la guerre.
4.2. L’Assemblée félicite la Serbie d’avoir ratifié la Convention européenne sur l’imprescriptibilité des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre (STE no 82). Elle se félicite également de la signature de la Convention relative au dédommagement des victimes d’infractions violentes (STE no 116) et encourage la Serbie à la ratifier sans délai.
4.3. L’Assemblée prend acte de la volonté des autorités serbes d’améliorer le système de protection des témoins en déléguant cette responsabilité et compétence au ministère de la Justice, et de protéger comme il se doit les témoins; l’Assemblée invite la Serbie à élaborer puis adopter sans délai une législation pertinente et conforme à la Résolution 1784 (2011) de l'Assemblée sur la protection des témoins: pierre angulaire de la justice et de la réconciliation dans les Balkans.
5. L’Assemblée a suivi l’évolution de la situation concernant le statut du Kosovo 
			(2) 
			Toute
référence au Kosovo dans ce texte, que ce soit le territoire, les
institutions ou la population, doit se comprendre en pleine conformité
avec la Résolution 1244 du Conseil de sécurité des Nations Unies
et sans préjuger du statut du Kosovo., et le dialogue entre Belgrade et Pristina. L’Assemblée condamne avec fermeté les violents incidents qui ont eu lieu en juillet 2011 dans le nord du Kosovo – incidents qui ont fait plusieurs victimes. Elle salue la reprise du dialogue entre Belgrade et Pristina et l’accord conclu en juillet 2011 sur la liberté de circulation des personnes et des véhicules, l’échange d’informations au sujet du statut civil et l’accord de novembre 2011 sur la reconnaissance mutuelle des diplômes de l’enseignement secondaire et supérieur. L’Assemblée invite tous les acteurs à appliquer ces accords de bonne foi. Ce type d’accord très concret aura des effets positifs sur les populations.
6. L’Assemblée réitère l’appel lancé dans la Résolution 1661 (2009) et espère très sincèrement que les partis politiques auront recours à des moyens pacifiques et démocratiques, et sauront faire les compromis nécessaires pour trouver une solution acceptable pour tous les acteurs et garantir ainsi la sécurité de toutes les personnes vivant dans la région.
7. L’Assemblée note que l’intégration dans l’Union européenne est l’un des objectifs visés au cours de ces dernières années par la Serbie et a permis d'accélérer de nombreuses réformes dans le domaine des droits de l’homme, de l’Etat de droit et de la démocratie. La décision prise le 12 octobre 2011 par la Commission européenne de proposer d'octroyer à la Serbie le statut de pays candidat est une manière de reconnaître très clairement les progrès accomplis.
8. L’Assemblée se félicite de l’engagement de la Serbie à poursuivre son intégration dans l'Union européenne et réaffirme son soutien aux autorités serbes à cet égard. Dans ce contexte, l’Assemblée prend note des conclusions adoptées par le Conseil européen le 9 décembre 2011 reconnaissant les progrès considérables accomplis par la Serbie pour satisfaire aux critères politiques fixés par le Conseil européen à Copenhague et aux exigences du processus de stabilisation et d'association. Elle note également que le Conseil européen décidera en février/mars 2012 d'octroyer à la Serbie le statut de pays candidat après avoir vérifié et confirmé que la Serbie a continué de faire preuve d'un engagement crédible et de progresser dans la mise en œuvre de bonne foi des accords conclus dans le cadre du dialogue avec Pristina, et a activement coopéré avec la mission «Etat de droit» de l'Union européenne au Kosovo (EULEX) et la KFOR.
9. Concernant le fonctionnement des institutions démocratiques, l’Assemblée souligne les progrès accomplis dans le respect de la Résolution 1661 (2009). Plus particulièrement, l’Assemblée:
9.1. note la stabilité politique depuis les dernières élections législatives en 2008 qui crée les conditions favorables au progrès de la société et à la mise en œuvre des réformes nécessaires en matière de démocratie, de droits de l’homme et de prééminence du droit. L’Assemblée appelle de nouveau l’opposition à adopter une attitude constructive, et la coalition majoritaire à créer les conditions d’un dialogue positif avec l’opposition, dans les domaines majeurs;
9.2. se félicite de l’adoption de la Loi sur l’Assemblée nationale le 26 février 2010, de son nouveau Règlement intérieur le 28 juillet 2010 et des Règles régissant l’organisation et les travaux des services parlementaires le 5 juillet 2011; autant d’éléments qui devraient faire du Parlement serbe une institution plus efficace et plus moderne, renforcer son rôle et en faire un forum approprié pour les débats démocratiques;
9.3. encourage l’Assemblée nationale de Serbie à poursuivre, en collaboration avec l’Assemblée parlementaire, l’élaboration d’un Programme de suivi d’assistance parlementaire, en utilisant pleinement, entre autres, les possibilités de financement liées à l’Instrument d’aide de préadhésion de l’Union européenne, et à renforcer encore la capacité de l’Assemblée nationale à jouer un rôle de plus en plus actif dans le processus politique et améliorer la qualité des travaux parlementaires et le rôle de l’opposition au sein du Parlement;
9.4. félicite la Serbie d’avoir adopté, en 2011, la Loi portant amendement de la législation relative à l’élection des parlementaires serbes, en accord avec les recommandations conjointes de la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise) et de l’OSCE/BIDDH; cette réforme a mis le système serbe d’attribution des mandats parlementaires en conformité avec les normes européennes, supprimant ainsi le système des mandats «gérés par les partis» et celui des «lettres de démission non datées», comme l’a demandé l’Assemblée dans sa Résolution 1661 (2009); en outre, l’Assemblée se félicite du fait que ces réformes vont permettre une participation accrue des femmes au parlement, jusqu’à hauteur de 30%; cependant, l’Assemblée prend note du fait que la Constitution serbe contient toujours une disposition autorisant les «mandats impératifs»;
9.5. se félicite des amendements à la Loi de 2007 sur les élections locales adoptés le 20 juin 2011 et mettant officiellement un terme au système des «lettres de démission non datées», au niveau local, en vertu d’une décision de la Cour constitutionnelle du 20 avril 2010;
9.6. considère l’adoption de la Loi de 2009 sur un Registre électoral unique (entrée en vigueur en décembre 2011) comme un progrès positif pour améliorer l’exactitude et la sécurité des données; cependant, l’Assemblée déplore que la Loi sur la Commission électorale d’Etat n’ait pu être adoptée à temps et qu'elle ne sera pas en vigueur lors des élections législatives de 2012;
9.7. se félicite de l’adoption, le 14 juin 2011, de la Loi sur le financement des activités politiques, conformément aux recommandations du Groupe d'Etats contre la corruption (GRECO) et de la Commission de Venise;
9.8. se félicite du renforcement de l'autonomie locale et, notamment, de l’adoption en novembre 2009 de la Loi sur la juridiction de la Province autonome de Vojvodine suivie de l’entrée en vigueur du Statut de l’Assemblée provinciale de Vojvodine; l’Assemblée se félicite également de l'adoption de la Loi relative aux biens publics en septembre 2011 et de la Loi portant amendement à la Loi sur le financement des pouvoirs locaux en juillet 2011 qui a modifié la méthode de calcul des transferts et la part des pouvoirs locaux sur les recettes tirées de la taxe sur les salaires;
9.9. félicite la Serbie pour la création et le renforcement d'instances indépendantes de régulation telles que les Bureaux du protecteur des droits du citoyen (Médiateur), le Commissaire à la protection de l’égalité, ou encore le Commissaire à la protection du libre accès à l’information. Elle considère que ces instances constituent des mécanismes globaux et efficaces pour le renforcement de la protection des droits du citoyen et un fonctionnement efficace des institutions démocratiques serbes et encourage la Serbie à poursuivre dans cette voie;
9.10. par conséquent, invite les autorités serbes:
9.10.1. à supprimer, dans la Constitution, les dispositions ayant établi le «mandat impératif» pour les membres du parlement;
9.10.2. à prendre les mesures nécessaires à la révision de la loi électorale après la tenue des élections parlementaires de 2012 et adopter la Loi sur la Commission électorale d’Etat afin de mettre en place une autorité indépendante et autonome de surveillance des élections;
9.10.3. à renforcer le rôle de contrôle du parlement;
9.10.4. à faire en sorte que l’Agence de lutte contre la corruption soit suffisamment dotée pour contrôler le financement des partis politiques et prendre les sanctions appropriées, le cas échéant;
9.10.5. à mettre en œuvre la Recommandation 316 (2011) du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe, poursuivre la mise en œuvre de la réforme globale de décentralisation conformément à la Charte européenne de l’autonomie locale (STE no 122) et adopter la Loi sur le personnel des pouvoirs locaux en vue d’accroître les capacités de ces derniers;
9.10.6. à signer et ratifier sans délai la Convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière des collectivités ou autorités territoriales (STE no 106), ainsi que ses protocoles additionnels.
10. En ce qui concerne l’Etat de droit, l’Assemblée:
10.1. prend acte de la réforme globale de la justice menée depuis 2008 et ayant conduit à l’adoption de la Loi sur l’organisation des tribunaux, de la Loi sur les magistrats, de la Loi sur le Conseil supérieur de la justice, de la Loi sur le ministère public, de la Loi sur le Conseil national des procureurs, et de la Loi sur les sièges et districts des juridictions et du ministère public; l’Assemblée se félicite du recours, par la Serbie, à l’expertise de la Commission de Venise pour l’élaboration de la plupart de ces lois;
10.2. considère que la Loi sur l’Ecole de la magistrature adoptée en juillet 2011 renforcera un système de recrutement des magistrats fondé sur le mérite et encourage les autorités serbes à renforcer encore la formation initiale et continue des magistrats;
10.3. reste préoccupée par le manque d'indépendance du pouvoir judiciaire et souligne le besoin de renforcer les institutions et de restaurer la confiance des personnes dans leur système judiciaire;
10.4. concernant l’examen des cas de 800 magistrats non réélus et de 150 procureurs non réélus du fait de la réforme du système judiciaire et des décisions du Conseil supérieur de la justice et du Conseil national des procureurs:
10.4.1. constate qu’après un retard du processus d’examen entrepris en décembre 2009, cette démarche a finalement repris avec le concours d’organisations internationales et sur la base de critères plus transparents;
10.4.2. considère que, malgré quelques déficiences, ce processus devrait permettre un système plus équitable de renouvellement des mandats des juges et des procureurs;
10.4.3. demande instamment au Conseil supérieur de la justice et au Conseil national des procureurs de parachever la procédure de renouvellement des mandats des juges et des procureurs à partir de critères objectifs, incontestés, transparents et non partisans, dans des délais raisonnables et en conformité avec les normes européennes;
10.5. se félicite du projet de révision, dans le sens d’une efficacité accrue, de la Loi relative à la Cour constitutionnelle, et invite les autorités serbes à prendre en considération le futur avis de la Commission de Venise sur ce projet de loi;
10.6. reste très préoccupée par la corruption encore largement répandue en Serbie et qui affecte de nombreux secteurs de la société, y compris la vie politique, le système judiciaire, la santé et l'éducation;
10.7. se félicite de la coopération entre la Serbie et le Conseil de l’Europe dans les domaines de la réforme judiciaire et de la lutte contre la corruption, le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme;
10.8. en particulier, invite les autorités serbes:
10.8.1. à élaborer puis mettre en œuvre la législation relative au système judiciaire – et ce, en conformité avec les normes européennes, en garantissant notamment l’indépendance du pouvoir judiciaire et des procureurs vis-à-vis du pouvoir politique; dans ce contexte, l’Assemblée est préoccupée par l’influence politique que peuvent avoir le parlement et le Président sur le pouvoir judiciaire;
10.8.2. à adopter des mesures spécifiques de lutte contre la corruption au sein du système judiciaire, tout en préservant le principe fondamental de l’indépendance des magistrats;
10.8.3. à appliquer intégralement les recommandations du Groupe d’Etats contre la corruption (GRECO);
10.8.4. 4 à adopter la législation qui permettra la mise en œuvre du nouveau Code de procédure pénale de 2011, conformément aux normes du Conseil de l’Europe;
10.8.5. à poursuivre la collaboration avec le Conseil de l’Europe pour le renforcement de l’Agence de lutte contre la corruption, qui jouera un rôle accru dans la mise en œuvre des différentes politiques et mesures contre la corruption politique et administrative;
10.8.6. à mettre en place un système effectif et efficace de protection en ce qui concerne les «donneurs d’alerte» employés à la fois par le secteur public et le secteur privé;
10.8.7. à ne pas économiser les efforts visant à renforcer la législation et les politiques contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme – en accord avec les recommandations du Comité d'experts sur l'évaluation des mesures de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme (MONEYVAL).
11. Concernant les droits de l’homme, l’Assemblée:
11.1. se félicite de l’adoption de la Loi de 2009 contre les discriminations, et de l’élaboration d’une politique globale contre les discriminations, ayant pour objectif d’éliminer toutes les formes de discrimination, y compris à l’égard des minorités sexuelles;
11.2. salue l'adoption de la Loi sur la résidence et le domicile des citoyens en novembre 2011, ainsi que l’adoption de la Loi portant amendement à la Loi relative à la carte d’identité (en vigueur depuis juin 2011) et de la Loi portant amendement à la Loi relative aux frais administratifs publics de juillet 2011;
11.3. considère que l’adoption, en août 2009, de la Loi sur les conseils nationaux de minorités nationales, et l’élection, le 6 juin 2010, de 19 conseils concernant plus de 400 000 membres de 16 minorités nationales différentes – sont un facteur de promotion du dialogue et de la coopération entre le pouvoir central et les communautés minoritaires, notamment dans les domaines de l’utilisation des langues minoritaires, de l’éducation et de la représentation des minorités dans les organes politiques et administratifs à tous les niveaux;
11.4. déplore l’impossibilité, à ce jour, d’organiser correctement l’élection du conseil national de la minorité bosniaque et invite les autorités serbes à favoriser le dialogue interethnique, interreligieux et interculturel et à redoubler d’efforts pour promouvoir le développement économique et social de cette région;
11.5. se félicite de l’adoption par le parlement, le 28 juillet 2011, de la Loi complémentaire de la loi de ratification du Protocole facultatif à la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains et dégradants;
11.6. se félicite de l’adoption de la Loi de 2009 sur un service civil, régissant les questions d’objection de conscience et de service civil de substitution, conformément à la demande de l’Assemblée dans sa Résolution 1661 (2009);
11.7. condamne très vivement les menaces et agressions contre les journalistes indépendants et les médias;
11.8. plus particulièrement, invite les autorités serbes:
11.8.1. à assurer l’application intégrale de la Loi de 2009 contre les discriminations par la mise en œuvre de la Résolution CM/ResCMN(2011)7 du Comité des Ministres de mars 2011 sur l’application de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales (STE no 157), ainsi que des recommandations de la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI) du 23 mars 2011, des conclusions du rapport du Commissaire aux droits de l’homme de septembre 2011, et de la résolution à venir du Comité des Ministres sur l’application de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires (STE no 148);
11.8.2. à poursuivre la réforme de l’éducation et prendre des mesures en vue d’intégrer aux programmes scolaires les principes de tolérance, de respect d’autrui, de dialogue interculturel et de réconciliation;
11.8.3. à examiner les réalisations des conseils nationaux des minorités nationales et les défis auxquels ils sont encore confrontés un an après leur entrée en fonction;
11.8.4. à publier, en temps opportun, le rapport du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) et coopérer avec le Conseil de l’Europe pour l’application des recommandations du CPT;
11.8.5. à enquêter sur tous les cas de violence et de harcèlement à l’égard des journalistes et prendre des mesures pour assurer leur protection;
11.8.6. lors de la mise en œuvre de la nouvelle stratégie relative aux médias adoptée le 28 septembre 2011, à veiller à ce que la législation qui sera adoptée soit conforme aux normes du Conseil de l’Europe, et notamment:
11.8.6.1. à veiller à ce que l’Etat ne soit plus propriétaire des médias – et ce, conformément à un calendrier défini à l’avance;
11.8.6.2. à dépénaliser la diffamation – conformément à la Résolution 1577 (2007) «Vers une dépénalisation de la diffamation»;
11.8.6.3. à garantir la liberté d’information et l’indépendance financière et éditoriale des médias;
11.8.6.4. à veiller en particulier à ce que la future législation relative aux médias prévoie des mesures précises visant à garantir l’indépendance en matière de politique éditoriale;
11.8.7. à modifier le Code pénal et y intégrer le crime de «discours de haine» – en conformité avec la Recommandation no R (97) 20 du Comité des Ministres;
11.8.8. à signer et ratifier la Convention européenne sur la nationalité (STE no 166) et la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention des cas d’apatridie en relation avec la succession d’Etats (STCE no 200);
11.8.9. à poursuivre leur action pour la mise en œuvre de la Stratégie pour le progrès des Roms, en accordant une attention particulière à la question des documents d’identité personnels des Roms et au problème de leur accès à l’emploi, aux soins de santé, à l’éducation et au logement.
12. Concernant l’adhésion aux conventions du Conseil de l’Europe, l’Assemblée:
12.1. se félicite du fait qu’à ce jour, la Serbie ait signé et ratifié 77 conventions du Conseil de l’Europe, et ainsi respecté tous ses engagements à ce sujet à l'exception de la signature et la ratification de la Convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière des collectivités ou autorités territoriales (Convention de Madrid, STE no 106);
12.2. invite les autorités serbes à ratifier sans délai les six conventions signées mais non encore ratifiées.
13. En conclusion, l’Assemblée reconnaît les progrès notables accomplis par la Serbie en matière de respect de ses obligations et engagements. L’Assemblée félicite les autorités serbes pour les réformes très importantes réalisées, et encourage la Serbie à poursuivre la coopération avec le Conseil de l’Europe en vue d’améliorer la législation du pays et ses pratiques en ce qui concerne la prééminence du droit, la démocratie et les droits de l’homme. L’Assemblée espère que les prochains gouvernement et parlement poursuivront ces réformes, s'investiront encore pour achever la mise en œuvre des engagements et obligations en suspens et poursuivront le dialogue avec Pristina par des moyens pacifiques et diplomatiques.
14. Afin de veiller au respect de quelques engagements et obligations majeurs que la Serbie doit encore mettre en œuvre, l’Assemblée décide de poursuivre le suivi du respect des obligations et engagements par la Serbie. Afin d’achever le processus de suivi et d’entamer un dialogue postsuivi, l’Assemblée fixe les objectifs suivants:
14.1. mettre en œuvre intégralement la réforme du système judiciaire afin de garantir son indépendance et son efficacité, et veiller notamment à parachever le processus de révision de la question des juges et procureurs non réélus;
14.2. adopter et mettre en œuvre des politiques efficaces de lutte contre la corruption;
14.3. adopter les amendements au Code pénal conformément aux recommandations du GRECO;
14.4. améliorer la situation des médias;
14.5. garantir intégralement la mise en œuvre des droits des minorités, en particulier des Roms.

B. Exposé des motifs par M. Harutyunyan et M. Saar, corapporteurs

(open)

1. Introduction

1. L'Assemblée parlementaire a adopté le 28 avril 2009 la Résolution 1661 (2009) sur le respect des obligations et engagements de la Serbie et décidé de poursuivre la procédure de suivi à l’égard de la Serbie. Pour assurer le contrôle de la mise en œuvre de cette résolution, la commission de suivi a désigné le 1er octobre 2009 M. Davit Harutyunyan (Arménie, GDE) comme corapporteur, et désigné, en remplacement de M. Andreas Gross (Suisse, SOC), corapporteur depuis 2006, Mme Sinikka Hurskainen (Finlande, SOC) le 27 avril 2010, puis M. Indrek Saar (Estonie, SOC) le 31 mai 2011.
2. Trois visites d'information ont été organisées en Serbie du 20 au 22 janvier 2010, du 29 novembre au 2 décembre 2010 
			(3) 
			Voir document AS/Mon
(2010) 34 rev, note d’information des corapporteurs sur leur visite
d’information à Belgrade et à Novi Pazar (28 novembre - 2 décembre
2010). et du 19 au 22 septembre 2011 pour évaluer les derniers développements politiques et juridiques.
3. Nous félicitons la commission des affaires étrangères du Parlement serbe pour la préparation et la finalisation d'une feuille de route pour la mise en œuvre des engagements en suspens et des obligations statutaires conformément à la Résolution 1661 (2009). Dans cette résolution, l'Assemblée invitait les autorités serbes «à élaborer une feuille de route pour la mise en œuvre des obligations et engagements que le pays doit encore honorer en matière de coopération avec le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY), de fonctionnement des institutions démocratiques, d’Etat de droit et de droits de l’homme». Nous remercions la délégation de la Serbie auprès de l'Assemblée parlementaire et son secrétariat pour leur collaboration et pour l'envoi à la commission de suivi d'une feuille de route approuvée par le Parlement serbe le 16 mars 2011 
			(4) 
			AS/Mon (2011)10. Ci-dessous:
«feuille de route du parlement, mars 2011». et mise à jour en décembre 2011. Les corapporteurs souhaitent également remercier la délégation serbe pour les commentaires soumis à la commission de suivi le 30 novembre 2011.
4. La préparation de ce rapport et l'organisation des visites d'information en Serbie ont été possibles grâce à la collaboration du Parlement de la Serbie et de la délégation serbe auprès de l'Assemblée parlementaire, ainsi que du Bureau du Conseil de l'Europe à Belgrade, que les corapporteurs souhaitent vivement remercier pour leur précieuse assistance.

2. Développements récents

2.1. Coopération régionale

5. Au cours des derniers mois, la Serbie a accompli des progrès dans le domaine de la coopération régionale. Une série de visites diplomatiques ont contribué à améliorer les relations régionales de la Serbie avec ses pays voisins. Le Président serbe, M. Tadić, s'est rendu au Monténégro du 7 au 8 juillet 2010, pour la première fois depuis la dissolution de la Communauté d'Etats de Serbie-et-Monténégro en juin 2006. Le Président Tadić a assisté, le 11 juillet 2010, à la commémoration du massacre de Srebrenica, au cours de laquelle il a exprimé des regrets pour les crimes commis à Srebrenica. Le Président croate, Mr Josipović, a effectué sa première visite officielle en Serbie du 18 au 19 juillet 2010. Le Président Tadić et le Président Josipović ont exprimé le souhait profond d'améliorer les relations entre leurs pays et déclaré leur accord sur le fait que les deux voisins sont sur la bonne voie pour le règlement des questions pendantes (c'est-à-dire le retour des réfugiés serbes de Croatie, la question de la frontière des Etats, ainsi que celle des personnes portées disparues et celle des minorités et de la protection de leurs droits). Au cours de sa visite à Vukovar le 4 novembre 2010, le Président Tadić a rendu hommage aux victimes des atrocités de la guerre commises en 1991, et avec le Président croate, M. Josipović, a présenté ses excuses aux familles des personnes assassinées. Le 6 juillet 2011, au cours de sa première visite officielle à Sarajevo depuis cinq ans, le Président Tadić a assuré que la Serbie souhaitait respecter l'intégrité territoriale et la souveraineté de la Bosnie-Herzégovine. En reconnaissance de son action politique en faveur de la réconciliation des Balkans et de l’intégration de son pays dans le processus de construction européenne ainsi que de son soutien à la justice internationale, Boris Tadić s’est vu décerner, le 2 novembre 2011, le prix Nord-Sud du Conseil de l'Europe.
6. Convaincus que la Serbie peut jouer un rôle positif et constructif pour la stabilisation de la région, nous souhaitons que les autorités serbes poursuivent la mise en œuvre d'une politique extérieure visant à renforcer le dialogue, la réconciliation et la coopération dans la région, en particulier avec le Monténégro et la Croatie. Nous encourageons les autorités serbes à poursuivre le dialogue et à promouvoir des relations de bon voisinage fondées sur le respect de la souveraineté des pays voisins 
			(5) 
			L'évocation récente
d'un statut de nation constituante pour les Serbes vivant en Croatie
et au Monténégro mentionnée dans la Stratégie pour la Diaspora élaborée
en janvier 2011 a soulevé de nombreuses protestations des autorités
croates et monténégrines. Ces dispositions controversées ont été
abrogées en mars 2011 (BBC Monitoring International Reports, 11
mars 2011; V.I.P. Daily News Reports, 16 mars 2011)..
7. A la suite de l’adoption de la Résolution 1786 (2011) sur la réconciliation et le dialogue politique entre les pays de l’ex-Yougoslavie 
			(6) 
			Résolution 1786 (2011), adoptée le 26 janvier 2011 (rapporteur: M. Pietro Marcenaro,
Italie, Groupe socialiste)., nous encourageons les autorités serbes à appuyer la création d’une commission régionale d’établissement des faits relatifs aux crimes de guerre et autres violations graves des droits de l'homme commis sur le territoire de l’ex-Yougoslavie (REKOM), en associant tous les pays impliqués dans ces conflits afin d'améliorer la compréhension mutuelle des événements passés, d’honorer et de reconnaître toutes les victimes. Nous nous réjouissons que cette initiative ait recueilli le soutien du Président Boris Tadić, de la présidente du parlement Slavica Đukić Dejanović et de nombreux leaders de partis politiques 
			(7) 
			Voir <a href='http://www.zarekom.org/news/Political-Support-to-RECOM-in-Serbia.en.html'>www.zarekom.org/news/Political-Support-to-RECOM-in-Serbia.en.html</a>..
8. Nous saluons un premier accord intervenu le 19 juin 2011 sur la distribution des biens de l'ex-République fédérative socialiste de Yougoslavie entre les Etats successeurs et encourageons les autorités des pays concernés à poursuivre et achever les négociations en cours 
			(8) 
			La Serbie – qui, selon
un système de quotas, détiendra 39% des biens – obtient ainsi l'ambassade
à Prague et des résidences à Washington et à Ottawa. L'accord porte
sur la distribution de biens immobiliers: ambassades, consulats, résidences,
etc. La distribution des biens situés dans des pays membres de l'OCDE
devrait être achevée d'ici la mi- 2012, selon les déclarations du
secrétaire général du ministère des Affaires étrangères Vladimir
Curguz (V.I.P., 5 juillet 2001, Distribution of Part of Former Yugoslavia’s
Property Abroad Agreed)..

2.2. Coopération avec le Conseil de l'Europe

9. Nous saluons la ratification par la Serbie de plusieurs conventions du Conseil de l'Europe depuis juin 2009, y compris:
  • la Charte sociale européenne (révisée) (STE no 163);
  • la Convention sur la cybercriminalité et son Protocole additionnel (STE nos 185 et 189);
  • la Convention sur la lutte contre la traite des êtres humains (STCE no 197);
  • la Convention relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime et au financement du terrorisme (STCE no 198);
  • la Convention pour la prévention du terrorisme (STCE no 196);
  • le Protocole portant amendement à la Convention européenne pour la répression du terrorisme (STE no 190);
  • la Convention européenne sur la télévision transfrontière (STE no 132);
  • la Convention européenne pour la protection du patrimoine archéologique (révisée) (STE no 143);
  • la Convention-cadre sur la valeur du patrimoine culturel pour la société (STCE no 199);
  • la Convention sur la protection des enfants contre l'exploitation et les abus sexuels (STCE no 201);
  • la Convention européenne sur l'imprescriptibilité des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre (STE no 82);
  • la Convention sur les droits de l'homme et la biomédecine (STE no 164);
  • la Convention européenne du paysage (STE no 176);
  • le Troisième Protocole additionnel à la Convention européenne d'extradition (STCE no 209).
10. Au cours de la même période, les conventions suivantes ont été signées par les autorités serbes et nous les encourageons à les ratifier dans les meilleurs délais:
  • la Convention européenne relative au dédommagement des victimes d'infractions violentes (STE no 116);
  • la Convention européenne sur l'exercice des droits des enfants (STE no 160);
  • la Convention européenne en matière d'adoption des enfants (révisée) (STCE no 202);
  • la Convention du Conseil de l'Europe sur l'accès aux documents publics (STCE no 205) 
			(9) 
			Etat des signatures
et ratifications des traités du Conseil de l'Europe par la Serbie
au 24 novembre 2011, 
			(9) 
			<a href='http://www.conventions.coe.int/'>www.conventions.coe.int</a>..
11. Conformément au paragraphe 14.5.6 de la Résolution 1661 (2009), la Serbie est invitée à signer et ratifier la Convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière des collectivités ou autorités territoriales (Convention de Madrid, STE no 106). Nous avions été informés en décembre 2010 que le processus de ratification était prévu dans un futur proche. Nous encourageons les autorités serbes à y procéder dans les meilleurs délais.

2.3. Coopération avec l'Union européenne

12. Les derniers mois ont été caractérisés par une activité intense visant à accélérer l'adhésion de la Serbie à l'Union européenne. Les ministres des Affaires étrangères de l’Union européenne ont convenu, le 25 octobre 2010, de demander à la Commission européenne de préparer un avis sur la candidature d’adhésion de la Serbie. Le Commissaire européen à l'élargissement et à la politique européenne de voisinage, M. Štefan Füle, a remis à la Serbie le questionnaire de la Commission, auquel la Serbie a répondu fin janvier 2011. Le questionnaire comprenait près de 2 500 questions portant sur 33 domaines.
13. La Serbie a adopté en décembre 2009 un programme national pour l'intégration de la Serbie dans l'Union européenne et en mars 2010 un plan d'action axé sur des activités fondamentales 
			(10) 
			<a href='http://www.seio.gov.rs/'>www.seio.gov.rs</a>. (et «dix commandements» de l’Union européenne) en vue d'obtenir le statut de pays candidat d’ici fin 2011. Nous avons noté qu'un grand nombre de ses activités fondamentales (telles que la coopération avec le TPIY, le financement des partis politiques, la réforme du système judiciaire, les organes de réglementation, l'inclusion des Roms, etc.) font partie des obligations et engagements en suspens identifiés dans la Résolution 1661 (2009).
14. Nous notons par ailleurs que l'Accord de stabilisation et d'association a été ratifié par le Parlement européen le 19 janvier 2011 et par 23 pays de l'Union européenne depuis le 14 juin 2010 
			(11) 
			<a href='http://www.seio.gov.rs/serbia-and-eu/ratification-of-the-saa.61.html'>www.seio.gov.rs/serbia-and-eu/ratification-of-the-saa.61.html</a>..
15. Il est indéniable que la volonté exprimée par les autorités serbes d'intégrer l'Union européenne a été un moteur dans la conduite des réformes. Les progrès législatifs réalisés au cours des derniers mois, mais aussi l'arrestation des fugitifs Mladić et Hadzić (voir infra), en ont été l'illustration et nous encourageons vivement les autorités serbes à poursuivre leurs efforts pour achever le processus d'intégration européenne.
16. Nous prenons acte du rapport de suivi publié par la Commission européenne le 12 octobre 2011. Dans ses conclusions, la Commission européenne recommande «que le Conseil accorde à la Serbie le statut de pays candidat, compte tenu des progrès accomplis jusqu'à présent et étant entendu que le pays reprenne le dialogue avec le Kosovo et procède rapidement à la mise en œuvre, de bonne foi, des accords déjà conclus», ainsi que «l'ouverture des négociations d'adhésion avec la Serbie dès que le pays aura accompli de nouveaux progrès substantiels en ce qui concerne la priorité essentielle suivante: réaliser de nouvelles avancées sur la voie de la normalisation des relations avec le Kosovo, dans le respect des conditions du processus de stabilisation et d'association, en respectant pleinement les principes de la coopération régionale inclusive; en respectant pleinement les dispositions du traité instituant la Communauté de l'énergie; en trouvant des solutions pour les télécommunications et la reconnaissance mutuelle des diplômes; en continuant de mettre en œuvre de bonne foi tous les accords conclus et en coopérant activement avec la mission EULEX pour que celle-ci exerce ses fonctions sur l'ensemble du territoire du Kosovo» 
			(12) 
			Conclusions
et recommandations de l’Avis de la Commission sur la demande d'adhésion
de la Serbie (extrait de la Communication de la Commission au Parlement
européen et au Conseil «Stratégie d'élargissement et principaux
défis 2011-2012», COM(2011)666).. Le 9 décembre 2011, le Conseil européen a décidé de réexaminer en février 2012 la décision d'octroi du statut de pays candidat à la Serbie, sous réserve de progrès additionnels. 
			(13) 
			Voir les conclusions
du Conseil européen du 9 décembre 2011, EUCO 139/11, paragraphe
13, 
			(13) 
			<a href='http://www.consilium.europa.eu/uedocs/cms_data/docs/pressdata/en/ec/126714.pdf'>www.consilium.europa.eu/uedocs/cms_data/docs/pressdata/en/ec/126714.pdf</a>]

2.4. Coopération avec le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie et poursuites des criminels de guerre

17. Dans sa Résolution 1661 (2009), l'Assemblée avait invité la Serbie à coopérer pleinement avec le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY). Nous souhaitons féliciter les autorités serbes pour l'arrestation et l'extradition des deux derniers fugitifs de guerre recherchés par le TPIY, Ratko Mladić et Goran Hadzić (arrêtés respectivement le 26 mai 2011 et le 20 juillet 2011). Ces arrestations marquent une étape décisive et ouvrent de nouvelles perspectives de justice pour les victimes du conflit, de réconciliation dans la région et d'intégration européenne.
18. Les corapporteurs forment le vœu que la ratification de la Convention européenne sur l'imprescriptibilité des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre (STE no 82) permette à la justice de poursuivre son cours et encouragent la Serbie à ratifier la Convention européenne relative au dédommagement des victimes d'infractions violentes (STE no 116) signée le 12 octobre 2010, conformément à la Résolution 1661 (2009) (paragraphe 12).
19. Nous saluons également l'adoption, le 31 mars 2010, par l'Assemblée nationale de la Serbie, d'une déclaration condamnant les crimes commis à Srebrenica. Cette déclaration constitue une étape importante dans le programme de réconciliation et de renforcement des relations de bon voisinage dans la région, conformément à l'esprit de la Résolution 1661 (2009).
20. Nous souhaitons que ce processus de réconciliation se poursuive et que les crimes commis durant le conflit de l'ex-Yougoslavie soient poursuivis. Nous encourageons les autorités serbes à enquêter sur les personnes soupçonnées de crimes de guerre, de crimes contre l'humanité et de génocide, et, s'il existe suffisamment de preuves, à engager des poursuites à leur encontre.
21. A cet égard, nous pensons que la signature d’un protocole de coopération et d’extradition mutuelle par les parquets nationaux spécialisés dans les crimes de guerre en Serbie et en Bosnie-Herzégovine pourrait contribuer à des enquêtes plus effectives sur les crimes de guerre commis dans la région.
22. Nous souhaiterions également réitérer la nécessité d'offrir aux témoins la protection adéquate, conformément à la Résolution 1784 (2011) de l'Assemblée sur la protection des témoins: pierre angulaire de la justice et de la réconciliation dans les Balkans. Avec le Commissaire aux droits de l'homme, nous saluons l'intention des autorités d'améliorer le système de protection des témoins par le transfert des compétences concernées au ministère de la Justice 
			(14) 
			Communiqué de presse
du Commissaire aux droits de l'homme Thomas Hammarberg du 16 juin
2011 (CommDH 007(2011)), «Serbia has a key role to play in ensuring
transitional justice and social cohesion in the Western Balkans».
Le rapport du Commissaire a été publié le 22 septembre 2011 (CommDH(2011)29)..

2.5. Evénements au Kosovo

23. La coopération avec le Kosovo depuis l'adoption de la Résolution 1661 (2009) a été marquée par la poursuite du dialogue et de la recherche d'une solution par des moyens pacifiques, qui s'est traduite par la signature d'un protocole et de son annexe portant sur la coopération technique entre le ministère de l'Intérieur de la Serbie et la mission «Etat de droit» de l'Union européenne (EULEX) le 11 septembre 2009. Les événements tragiques intervenus cet été dans le nord du Kosovo montrent cependant que les relations entre Belgrade et Pristina restent tendues. Rappelons ici quelques faits intervenus depuis l'adoption de la Résolution 1661 (2009).
24. A la demande de la Serbie, l’Assemblée générale des Nations Unies a demandé à la Cour internationale de justice un avis consultatif sur la conformité de la déclaration unilatérale d’indépendance des institutions provisoires d’administration autonome du Kosovo avec le droit international. La cour a statué le 22 juillet 2010 que la déclaration d’indépendance du Kosovo n’était pas contraire au droit international 
			(15) 
			Voir Doc. 12281, La situation au Kosovo et le rôle du Conseil de l’Europe
(Rapporteur: M. Björn von SYDOW, Suède, Groupe socialiste) et <a href='http://www.icj-cij.org/'>www.icj-cij.org</a>. .
25. Le 26 juillet 2010, lors de sa session spéciale, le Parlement serbe a adopté une résolution sur le Kosovo et a approuvé (par 192 voix sur 220) la «poursuite des activités serbes en défense de sa souveraineté et de son intégrité territoriale». Le Parti radical serbe, le Parti démocratique de Serbie et les Démocrates libéraux ont voté contre.
26. Le 9 septembre 2010, l’Assemblée générale des Nations Unies a adopté par consensus une résolution conjointe de la Serbie et de l’Union européenne sur le Kosovo. La résolution reconnaît l’avis consultatif de la Cour internationale de justice sur la question précitée et appelle au dialogue entre Belgrade et Pristina. Le Président Tadić a souligné que cette résolution ouvre la voie à un dialogue sur de futures solutions au problème du Kosovo et préserve le droit de la Serbie de défendre son intégrité territoriale et ses intérêts légitimes au Kosovo par des moyens diplomatiques et pacifiques, en respectant les droits légitimes de la population albanaise 
			(16) 
			DPA/Inf(2010)33..
27. Dans une résolution approuvée le 1er décembre 2010, la commission des affaires étrangères du Parlement européen a demandé l’ouverture «sans retard» de discussions avec le Kosovo et a salué la volonté de la Serbie d’engager un dialogue dans le cadre de l’Union européenne, soulignant que l’engagement et la volonté des deux parties d’arriver à un compromis sont nécessaires pour la stabilité à long terme de la région et l’amélioration du bien-être de ses habitants.
28. Nous saluons les discussions entre les représentants serbes et albanais du Kosovo qui se sont déroulées au 1er semestre de 2011 et ont privilégié une approche pragmatique, centrée sur les problèmes quotidiens rencontrés par les citoyens de la région, sans préjuger de la position des parties concernées sur le statut du Kosovo. Nous nous réjouissons de l'accord obtenu le 2 juillet 2011 portant sur la liberté de mouvement des personnes et des véhicules 
			(17) 
			Ces véhicules doivent
disposer de plaques immatriculées «KS» (délivrées par l'UNMIK) ou
«RKS» (délivrées par les autorités du Kosovo), sous réserve d'utiliser
des plaques temporaires pour circuler sur le territoire serbe., et l'échange d'information concernant les registres d'état civil (avec la coopération technique d'EULEX). Un accord relatif à la reconnaissance mutuelle des diplômes et titres universitaires (qui seront certifiés par l’Association universitaire européenne) a été conclu le 22 novembre 2011. Le médiateur de l’Union européenne a également noté «certains progrès» s’agissant du droit pour le Kosovo de participer aux forums régionaux sous son propre drapeau et ses propres emblèmes, droit auquel la Serbie s’oppose au motif que cela conduirait à reconnaître l’indépendance du Kosovo 
			(18) 
			Fatmir
Aliu, Gordana Andric, «Kosovo, Serbia Reach Higher Education Deal», <a href='http://www.balkaninsight.com/'>www.balkaninsight.com</a>, 22 novembre 2011.. Nous espérons que les instances tripartites prévues puissent rapidement être opérationnelles pour assurer la mise en œuvre de cet accord.
29. Cet accord a été diversement accueilli en Serbie: alors que le chef de la délégation serbe en charge des négociations, Borislav Stefanovic, soulignait que cet accord profitait surtout aux Serbes vivant dans les enclaves au sud de la rivière Ibar, le Parti démocratique de Serbie (DSS), le Parti radical Serbe (SRS) et le Parti progressiste serbe (SNS) ont estimé que cet accord s'apparente à une perte progressive du Kosovo. Le Parti libéral démocratique (LDP) y voit plutôt l'amorce d'une nouvelle politique, qui profitera aux citoyens 
			(19) 
			V.I.P., 4 juillet 2011,
«Serbia closer to recognizing Kosovo independence, opposition accuses»..
30. Nous encourageons la Serbie à continuer à privilégier cette approche pragmatique et concrète, et à mener à bien les prochaines discussions portant sur les échanges commerciaux, les télécommunications et l'approvisionnement énergétique.
31. Dans le même temps, nous exprimons notre vive préoccupation face à la flambée de violence survenue cet été et qui perdure aujourd'hui 
			(20) 
			Une trentaine de soldats
de la KFOR ont été blessés le 28 novembre 2011, certains par des
armes de petit calibre, lorsque des centaines de Serbes ont résisté
à la tentative de la KFOR de lever les barricades érigées par les
Serbes dans le village de Jagnjenica. V.I.P., 5 décembre 2011., montrant que les relations entre les parties concernées restent fragiles et tendues. La Serbie (et la Bosnie-Herzégovine) ayant refusé de reconnaître les tampons douaniers portant les symboles du Kosovo, ou l'inscription «Services douaniers du Kosovo» (tels que reconnus par l'UNMIK), le Kosovo a décrété le 20 juillet 2011 le boycott des produits en provenance de Serbie et de Bosnie-Herzégovine, une mesure qui a provoqué des manifestations de protestation dans les quatre municipalités serbes du nord du Kosovo. Le 25 juillet 2011, Pristina a tenté de déployer des douaniers et des policiers relevant de son autorité sur les deux postes frontière Jarinje et Brnjak pour faire respecter l'embargo commercial, décrété cinq jours plus tôt, déclenchant la colère des Serbes du nord du Kosovo. Des incidents violents et tragiques s'ensuivirent, avec la mort d'un policier kosovar et l'incendie d'un des deux postes frontière.
32. Dans la nuit du 30 au 31 juillet 2011, le Parlement serbe a adopté une Déclaration sur le Kosovo par 181 voix (sur 207) 
			(21) 
			La coalition au pouvoir
et les partis d'opposition SRS, SNS, le parti de la Nouvelle Serbie
(NS). Le DSS, le LDP et Riza Halimi, seul député albanais du sud
de la Serbie, ont voté contre. Les quatre députés de l'Alliance
des Hongrois de Vojvodine se sont abstenus., condamnant la violence et appelant à la reprise du dialogue pour trouver une solution pacifique à la crise créée par l'action unilatérale de Pristina et la tentative de contrôle des postes frontière par la police du Kosovo.
33. Les 4 et 5 août, le commandant de la KFOR a conclu des accords avec les autorités de Belgrade et de Pristina: les deux postes frontière seront renommés «zones de sécurité militaire» et contrôlés par les troupes de la KFOR jusqu'à la mi-septembre. La KFOR veillera au passage des véhicules de 3,5 tonnes maximum, des convois humanitaires et des produits alimentaires.
34. A la mi-août 2011, plusieurs bus transportant des passagers entre Belgrade et l'est du Kosovo ont été refoulés par la police du Kosovo 
			(22) 
			B92,
16 août 2011, «Buses prevented from entering Kosovo»..
35. Nous invitons toutes les parties concernées à reprendre le dialogue, à condamner tout acte de violence et à se conformer aux accords internationaux – en particulier la Résolution 1244 du Conseil de Sécurité des Nations Unies et l’Accord de libre-échange centre-européen (CEFTA) auquel la Serbie et la MINUK (représentant le Kosovo) sont parties – relatifs à la circulation des personnes et des marchandises.
36. Nous recommandons également aux autorités serbes de poursuivre le dialogue avec Pristina fondé sur une approche pragmatique centrée sur les besoins et la sécurité des citoyens, et de faciliter dans ce contexte la participation des représentants du Kosovo dans les instances internationales et régionales. Nous souhaitons par ailleurs rappeler que la commission des questions politiques de l'Assemblée prépare actuellement un rapport sur la situation au Kosovo et affirmer notre soutien plein et entier au rapporteur sur la situation au Kosovo, M. Björn von Sydow, qui a déclaré à l’issue de sa visite dans la région début novembre 2011 que «la solution pour sortir de l'impasse dans le nord du Kosovo réside dans la recherche d'un compromis, avec des concessions de la part de toutes les parties» 
			(23) 
			Voir http://assembly.coe.int/ASP/NewsManager/FMB_NewsManagerView.asp?ID=7118.. Nous soulignons également qu’une solution pacifique suppose que toutes les parties fassent montre d’engagement et de bonne volonté et soient disposées à parvenir à un compromis.
37. Enfin, nous notons que la question du Kosovo a récemment été au centre des débats sur l'intégration de la Serbie dans l'Union européenne. Lors de son voyage officiel en Serbie le 23 août 2011, Mme Angela Merkel, chancelière de l'Allemagne, a invité la Serbie à démanteler les «institutions parallèles» serbes opérant dans le nord du Kosovo 
			(24) 
			Nous renvoyons à ce
propos au rapport de M. von Sydow: «Dans tout le Kosovo, des structures
serbes recevant un financement de Belgrade (dites «structures parallèles»)
fournissent des services de base à la communauté serbe dans des
domaines clés du quotidien tels que l’administration, la justice,
la santé et l’éducation. Au niveau politique également, les autorités
locales issues des élections kosovares fonctionnent parallèlement
à celles issues des élections serbes. En outre, le Conseil judiciaire
serbe a récemment annoncé sa décision de nommer des juges et des
procureurs dans des municipalités du Kosovo. Au nord du Kosovo,
où la majorité de la population est d’origine serbe, les structures
serbes sont la référence principale des habitants» (Doc. 12281, ibid., paragraphe
18).. Cette demande a été considérée comme inacceptable par le Président Tadić (qui n'envisage pas de quitter le nord du Kosovo) et a été perçue comme une nouvelle condition posée à l'obtention du statut de candidat et à l'ouverture des négociations en vue de l'adhésion de la Serbie à l'Union européenne. A l’approche des élections législatives de 2012, la question du Kosovo est également un sujet de plus en plus brûlant de politique intérieure. Nous sommes quelque peu inquiets que le DSS ait décidé de boycotter les sessions plénières du parlement depuis le 20 octobre 2011, dans l’attente du débat au sein du parlement d’une nouvelle déclaration sur le Kosovo.
38. Nous prenons note qu’un accord de principe sur les points de passage a été conclu le 2 décembre 2011, sous la médiation de l’Union européenne. Selon l’annonce du Conseil des ministres de l'Union européenne, les parties vont mettre en place progressivement des postes de contrôle communs, intégrés et uniques sur tous les points de passage entre leurs territoires, en présence d’EULEX, conformément à son mandat 
			(25) 
			V.I.P.,
5 décembre 2011. D’après les médias, les deux parties appliqueront
l’acronyme IBM («integrated border management ») mais l’interpréteront
à leur manière. Pour Pristina il s’agit de la gestion intégrée des
frontières, alors que, pour Belgrade, il s’agit de la gestion intégrée
de la limite administrative.. Le nouveau cycle de discussions entre Belgrade et Pristina a également abordé l’application des accords déjà signés. La mise en œuvre pleine et entière de l’accord relatif à la liberté de circulation est attendue le 26 décembre 2011, conférant ainsi à tous la possibilité de voyager librement. Les parties devraient commencer à reproduire les documents d’état civil à compter du 5 décembre 2011, conformément à l’accord sur le registre d’état civil. Nous espérons que ces accords contribueront à apaiser les tensions dans le nord du Kosovo et permettront la poursuite du dialogue entre Belgrade et Pristina par des moyens pacifiques et diplomatiques.

3. Fonctionnement des institutions démocratiques

3.1. Réforme de la loi électorale

39. Deux problèmes essentiels avaient été signalés dans la Résolution 1661 (2009). Le premier a trait aux mandats gérés par les partis. Selon l'avis de la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise), «les membres du parlement sont considérés comme des représentants de l’ensemble du peuple et ne doivent des comptes qu’à leur conscience. En conséquence, ils doivent se conformer uniquement aux règles et aucun ordre ou instruction ne peut leur être imposé 
			(26) 
			Avis
de la Commission de Venise 423/2007, CDL(2007)026rev, paragraphe
7.». Dans sa Résolution 1747 (2010), l’Assemblée exhorte le parlement de Serbie «à réviser le cadre constitutionnel existant en vue de supprimer le mandat géré par le parti et à réviser en conséquence la législation électorale, afin d’augmenter pour les électeurs la transparence concernant la procédure d’attribution de sièges aux listes de partis» et «à abroger les dispositions constitutionnelles et législatives prévoyant le rappel des représentants du peuple par les partis politiques (ce qui est appelé le “mandat impératif” 
			(27) 
			Concernant les «mandats
impératifs» des membres du Parlement serbe, voir le rapport sur
le respect des obligations et engagements de la Serbie de 2008 (corapporteurs:
M. Charles Goerens, Luxembourg, Alliance des démocrates et des libéraux
pour l’Europe, et M. Andreas Gross, Suisse, Groupe socialiste) – Doc. 11701, section 3.1.2.1.), et les dispositions législatives (…) permettant le changement d’ordre des candidats sur les listes des partis après la tenue des élections 
			(28) 
			Résolution 1747 (2010)
sur la situation de la démocratie en Europe et l’évolution de la
procédure de suivi de l'Assemblée, paragraphes 19.1.10 et 19.1.12.». Par ailleurs, l’OSCE/BIDDH et la Commission de Venise ont souligné, dans la Directive sur la réglementation des partis politiques 
			(29) 
			CDL-AD(2010)024, adopté
par la Commission de Venise à sa 184e session
plénière (Venise, 15-16 octobre 2010)., «qu’il arrive que des candidats élus sur une liste de parti renoncent à leur affiliation au parti ou changent de parti au cours de leur mandat. (…) Les fonctionnaires élus sont élus par les citoyens dans le cadre d’élections. La législation sur les partis politiques ne doit pas transférer à un parti politique le contrôle du mandat conféré par les électeurs 
			(30) 
			CDL-AD(2010)024,
paragraphe 139.».
40. Il nous a été expliqué que le système des mandats gérés par les partis a été traditionnellement établi pour garantir la stabilité politique. Nous avons aussi été informés que le système électoral devrait être révisé sous peu et qu’un système mixte devrait être instauré (avec des députés directement élus et des députés élus à partir des listes des partis). Cependant, le passage à un système mixte peut ne pas en soi régler entièrement la question des mandats gérés par les partis, à moins qu'il soit interdit de changer l'ordre des candidats sur les listes des partis. La réforme du système de mandats gérés par les partis était un élément essentiel des engagements postadhésion de la Serbie et des obligations statutaires du Conseil de l'Europe, comme le rappelle la Résolution 1661 (2009).
41. Le projet de loi «modifiant et amendant la loi relative à l’élection des membres du parlement» préparé au printemps 2011 envisageait l'instauration de ce système mixte. Dans l'avis adopté en mars 2011 
			(31) 
			CDL-AD(2011)005 adopté
les 25-26 mars 2011, paragraphes 11 et 16., la Commission de Venise a rappelé la position qu'elle avait prise en 2006 conjointement avec l'OSCE/BIDDH, spécifiant que «l’article 84 de la loi autorise les partis à choisir arbitrairement les candidats de la liste qui deviendront membres du parlement, après les élections, plutôt que d’en déterminer l’ordre au préalable. Cette procédure limite la transparence du système et confère aux partis politiques une position de force disproportionnée vis-à-vis des candidats». La Commission de Venise notait ainsi que l'amendement proposé ne faisait que «tempérer» l'article 84, qui prescrit qu’«au moins la moitié des sièges remportés seront alloués aux candidats selon l’ordre de la liste, tandis que pour le surplus, l’ancien système de désignation discrétionnaire par les partis subsiste».
42. En 2009, l'Assemblée avait invité les autorités serbes à réviser ce projet de loi et à s'assurer que la loi électorale était pleinement en conformité avec les normes européennes, et que soit aboli le système des mandats gérés par les partis politiques (voir la Résolution 1661 (2009), paragraphe 14.5.1). Nous prenons note, avec satisfaction, que la loi sur l'élection des membres du parlement de la République de Serbie, telle qu'amendée le 25 mai 2011, prévoit à présent que tous les sièges remportés par un parti politique seront alloués dans l'ordre des candidats sur la liste des partis, conformément aux recommandations de la Commission de Venise.
43. Enfin, pour compléter cette réforme électorale, et réitérant les demandes formulées par l'Assemblée et la Commission de Venise 
			(32) 
			Voir l'Avis de la Commission
de Venise CDL-AD(2007)004 (paragraphe 53), et son rapport sur le
mandat impératif et les pratiques similaires adopté lors de sa 79e session
plénière les 12 et13 juin 2009 (CDL-AD(2009)027)., nous invitons les autorités serbes à amender l'article 102.2 de la Constitution et à supprimer les dispositions constitutionnelles relatives aux mandats administrés par les partis politiques.
44. L’autre question pendante concerne les lettres de démission non datées – que les députés remettent aux dirigeants des groupes avant ou après les élections. Lors de notre visite en novembre 2010, nous avions été informés que cette pratique n’existe plus depuis 2006 et que les lettres de démission non datées ne sont plus acceptées: les députés qui souhaitent démissionner de leur parti politique doivent introduire une requête personnelle auprès de la commission administrative. Il convient de noter que, le 22 avril 2010, la Cour constitutionnelle a déclaré inconstitutionnelle la pratique des «lettres de démission non datées» par les conseillers municipaux, qui permettaient en fait au parti de gérer le mandat des représentants élus. Nous saluons donc l'adoption le 25 mai 2011 de la loi abolissant les lettres de démission non datées.
45. La loi sur le registre des électeurs a été adoptée le 11 décembre 2009. Le parlement a adopté le 20 juin 2011 des amendements à la loi sur les élections locales de 2007, qui permettra d'abolir formellement le recours aux lettres de démission non datées au niveau local.
46. Durant notre visite en septembre 2011, nous avions été informés que la loi sur la Commission nationale électorale était en cours d'élaboration et devait permettre la création d'une autorité indépendante et autonome pour la supervision des élections. Compte tenu des élections législatives qui devraient se tenir au printemps 2012, nous avions invité les autorités serbes à mettre en place le cadre législatif en temps utile. Nous avions toutefois été informés de la décision du ministère des Droits de l’homme et des Minorités, de l’Administration publique et de l’Autonomie locale de ne pas soumettre un projet de loi régissant un nouveau système électoral et un projet de loi sur la Commission nationale électorale, afin d’éviter toute modification substantielle du système électoral dans l’année précédant la tenue d’élections régulières.
47. Par ailleurs, nous invitons l'ensemble des acteurs politiques à contribuer au bon déroulement de la future campagne électorale et soulignons la nécessité de respecter les procédures démocratiques et de poursuivre les négociations politiques dans le cadre des institutions.

3.2. Réforme du parlement

48. Nous saluons l'adoption, par le Parlement serbe, de la loi sur l'Assemblée nationale le 26 février 2010 et son nouveau règlement, le 28 juillet 2010, conformément à la demande exprimée par l'Assemblée parlementaire dans la Résolution 1661 (2009), paragraphe 14.5.4. Le législateur a par ailleurs statué le 5 juillet 2011 sur l'organisation et le travail des services du parlement. Ces réformes visent à faire du parlement une institution plus moderne et efficiente, et à renforcer son rôle et son autonomie financière et administrative. Le parlement est désormais habilité à adopter son propre budget. L'adoption d'un nouveau règlement intérieur a permis d'améliorer le fonctionnement des commissions parlementaires, de mettre en place des auditions publiques, de faciliter l'exercice du mandat des parlementaires handicapés. Ce règlement vise à accroître l'efficacité des travaux par la réduction du temps alloué aux débats parlementaires lors de l'adoption des lois d'harmonisation avec l'acquis communautaire, une disposition toutefois déplorée par l'opposition et reflétée dans le rapport de suivi 2011 de la Commission européenne, qui appelle à l’application de critères plus stricts aux procédures urgentes et accélérées visant à une harmonisation avec l’acquis de l’Union européenne afin de limiter leur application aux mesures d’alignement technique sur l’acquis de l’Union européenne 
			(33) 
			Conclusions et recommandations
de la Commission européenne sur la Serbie, op.
cit., 12 octobre 2011..
49. Nous avons eu un long échange de vues avec les députés aussi bien de la coalition au pouvoir que des principaux partis d'opposition sur les nouvelles règles introduites au parlement, à savoir l'organisation des travaux, le temps de parole des députés, la couverture par la télévision, le rôle de l'opposition, etc. Tandis que les partis au pouvoir ont mis l’accent sur le rythme des réformes et le grand nombre de lois adoptées, les partis d'opposition ont déploré l'utilisation excessive de la procédure d'urgence pour adopter les lois, la limitation du temps de parole, etc.
50. Nous nous réjouissons également de l'adoption, le 14 juin 2011, de la loi sur le financement des activités politiques par 133 parlementaires (sur 250) de la coalition au pouvoir et du Parti libéral démocrate (LDP). Cette loi prévoit l'allocation de 0,1% du budget national au financement des campagnes électorales, et de 0,15% aux activités des partis politiques (cette dernière disposition prenant effet au 1er juillet 2012). Cette loi limite notamment le financement des partis politiques par des fonds privés 
			(34) 
			Tanjug,
14 juin 2011..

3.3. Mise en place des institutions de contrôle indépendantes

51. Nous saluons la mise en place ou le renforcement de plusieurs institutions de contrôle indépendantes au cours de ces derniers mois: l'Agence de lutte contre la corruption, le Médiateur, le Commissaire pour la protection de l'égalité, le Commissaire pour la protection de la liberté d'accès aux informations.
52. Nous notons avec satisfaction que l'institution du Médiateur fonctionne bien, avec du personnel qualifié dans ses bureaux de Belgrade et de Serbie du Sud. Le Médiateur a reçu près de 6 000 plaintes de citoyens dont les deux tiers ont été résolus. La majorité des plaintes avaient trait aux droits sociaux et économiques et au manque de réactivité de l’administration. Depuis 2007, le Médiateur d’Etat a formulé 270 recommandations individuelles et 50 recommandations générales 
			(35) 
			Conclusions
et recommandations de la Commission européenne sur la Serbie, op. cit., 12 octobre 2011. à l'intention des autorités compétentes, dont 80% ont été mises en œuvre dans les délais impartis. Le Médiateur soumet des rapports annuels et spécifiques et peut saisir les tribunaux pour faire des réclamations contre des lois et réglementations qui violent les normes constitutionnelles.
53. Il importe de sécuriser les institutions de contrôle indépendantes pour la pérennisation de la démocratie. A cet égard, il est indispensable d'allouer des ressources humaines et financières pour permettre à ces institutions de fonctionner convenablement et de devenir des organes efficients pour lutter contre la discrimination, la corruption et autres abus.
54. Par ailleurs, pour qu’elles portent des fruits, ces institutions de contrôle doivent nécessairement être indépendantes et intervenir dans le processus décisionnel. A l'issue de notre visite en Serbie en décembre 2010, nous avions exprimé notre préoccupation du fait que le nouveau règlement adopté en juillet 2010 par le parlement permet aux députés de rejeter les rapports de ces organes de réglementation, au risque d’affecter le travail de ces organes. Nous notons avec satisfaction que cette disposition a été modifiée après l’amendement apporté au règlement du parlement le 28 février 2011: les rapports sont désormais examinés par les commissions parlementaires compétentes. Ils sont soumis à l’Assemblée nationale, qui adopte les propositions de conclusions et recommandations quant aux mesures visant à améliorer la situation dans les domaines concernés.

3.4. Pouvoirs locaux

55. A la suite de l'adoption de la Constitution de 2006, de nouvelles lois sur l'aménagement du territoire, les collectivités locales, les élections locales et la capitale ont été adoptées le 29 décembre 2007. La loi sur la juridiction de la province autonome de Vojvodine a été adoptée en novembre 2009, permettant la promulgation du Statut de l’Assemblée provinciale de Vojvodine qui avait été adopté en octobre 2008 
			(36) 
			DPA/Inf(2010)34add.. La question de l'autonomie financière et de la restitution des propriétés aux collectivités locales et à la province autonome de Vojvodine reste toutefois pendante.
56. La loi sur la propriété publique a finalement été adoptée en septembre 2011. Les autorités serbes avaient pris un retard considérable dans la résolution d’un problème spécifique auquel est confrontée la Serbie, en l’occurrence la restitution des biens publics aux collectivités locales. L’adoption, en juillet 2011, de la loi portant modification de la loi sur les finances locales a modifié la méthode de calcul des transferts et la part de l’impôt sur les salaires qui revient aux collectivités locales.
57. Le ministre de l'Economie et du Développement régional a lancé la mise en place d'unités statistiques régionales (pour se conformer aux normes de l'Union européenne), mais en faisant observer que ces unités ne conduiraient pas à la création de régions politiques.
58. Le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l'Europe a adopté le 18 octobre 2011 la Recommandation 316 (2011) sur la démocratie locale et régionale pour évaluer l'état des pouvoirs locaux et régionaux depuis la signature de la Charte européenne de l'autonomie locale en 2007.
59. Dans son exposé des motifs 
			(37) 
			CG/MON(20)5, Rapport
sur la démocratie locale et régionale en Serbie adopté par la commission
du suivi du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux le 4 juillet
2011., le rapporteur du Congrès Odd Arild Kvalöy (Norvège, NI) note que la législation serbe en matière d'autonomie locale est sur la bonne voie et que des progrès considérables ont été réalisés dans le domaine de la participation des citoyens ou des minorités aux affaires locales, l'institution de bureaux locaux chargés des Roms ou de médiateurs au niveau local, voire, dans certaines villes ou la province autonome de Vojvodine, de bureaux pour les réfugiés et les personnes déplacées.
60. Le rapporteur du Congrès met toutefois en avant la nécessité de renforcer le cadre législatif et d'améliorer les ressources financières des collectivités locales, d'adopter une loi sur la propriété municipale et sur la restitution des biens aux communes, d’accroître les finances locales et de renforcer les capacités administratives au niveau local.
61. Nous nous référons à la Recommandation 316 (2011) du Congrès et invitons les autorités serbes à la mettre en œuvre et à lever les réserves formulées par la Serbie au moment de sa ratification de la Charte européenne de l’autonomie locale et concernant les articles relatifs au principe de subsidiarité et au principe de proportionnalité dans le contrôle administratif. Nous prenons acte des avancées récentes réalisées dans le domaine de la démocratie locale et de l'adoption, le 27 juin 2011, des amendements sur la loi sur le financement des autorités locales par 108 voix (sur 127). Ces amendements visent à accroître les ressources des collectivités territoriales, qui percevront, à partir du 1er octobre 2011, 80% des impôts sur les revenus (au lieu de 40% auparavant), la ville-capitale de Belgrade touchant 70% des impôts. Un système de péréquation financière devrait permettre de soutenir les communes les plus pauvres par la création d'un fonds de transferts de solidarité. Ces amendements ont toutefois été critiqués par le Conseil fiscal et les représentants du Fonds monétaire international en raison du coût de ces mesures et du risque d'accroissement du déficit public 
			(38) 
			Tanjug, 27 juin 2011
et V.I.P., 29 juin 2011..

4. Prééminence du droit

4.1. Réforme du système judiciaire

62. Dans sa Résolution 1661 (2009), l’Assemblée appelait les autorités serbes à intensifier leurs efforts notamment en ce qui concerne le renforcement de la transparence et de l’efficacité du système judiciaire. En 2009, la Commission européenne a exprimé son inquiétude quant au manque de transparence, à la performance et à l’efficacité du système judiciaire.
63. Les réformes judiciaires fondées sur la Stratégie nationale de réforme de la justice (SNRJ) de 2006 comprennent l’adoption de la loi sur la Cour constitutionnelle le 24 novembre 2007. Le 22 décembre 2008, le parlement a adopté la loi sur l’organisation des tribunaux (conduisant à la restructuration du système des tribunaux et à l’établissement de 34 tribunaux de première instance, 26 tribunaux supérieurs, 4 cours d’appel et de la Cour suprême de cassation 
			(39) 
			Conclusions et recommandations
de la Commission européenne sur la Serbie, op.
cit., 12 octobre 2011.), la loi sur les juges, la loi sur le Conseil supérieur de la magistrature, la loi sur le ministère public, la loi sur le Conseil national des procureurs et la loi sur les sièges et les districts des juridictions et du ministère public.
64. Nous tenons à exprimer notre satisfaction quant à l’excellente coopération mise en place par la Serbie avec la Commission de Venise, dont l’expertise a, depuis 2009, été sollicitée pour différents textes législatifs 
			(40) 
			La
Commission de Venise a adopté des avis sur différents textes législatifs
relatifs aux Critères des juges/procureurs en Serbie; la législation
électorale en Serbie; la loi sur les référendums; la loi sur la
liberté de réunion des citoyens de la République de Serbie<a href='http://www.venice.coe.int/site/dynamics/N_Opinion_ef.asp?L=E&OID=604'>;
sur le financement des partis politiques; les nominations judiciaires;
le projet de loi sur les modifications et les nouveaux amendements
à la loi sur l'élection des membres du Parlement de la République
de Serbie</a>; le projet de loi sur le financement des activités politiques;
les amendements à la loi sur la Cour constitutionnelle. Voir <a href='http://www.venice.coe.int/'>www.venice.coe.int</a>..
65. Le rapport final du projet de «soutien à la réforme du système judiciaire serbe, à la lumière des normes du Conseil de l’Europe» (commandé par la Direction générale des droits de l’homme et des affaires juridiques (DGHL) du Conseil de l’Europe), a été publié le 19 août 2010. Il porte sur le niveau d’application de la SNRJ de 2006 en Serbie, les obstacles à son application totale, et les mesures nécessaires pour atteindre cet objectif.
66. La SNRJ prévoit la création de deux instances autonomes, à savoir le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) (qui est le garant de l’autonomie et de l’indépendance des tribunaux et des juges, et l’instance de gestion et de surveillance du système judiciaire) et le Conseil national des procureurs (CNP), qui doit garantir l’indépendance et l’autonomie du ministère public.
67. Le rapport final de la DGHL souligne les efforts faits par les autorités serbes pour mettre en œuvre cette réforme globale. En même temps, il met en évidence plusieurs problèmes, notamment le manque de ressources humaines et financières, le besoin en formation, la nécessité d’une coopération entre le ministère de la Justice et le CSM et le CNP, la nécessité de procédures transparentes, etc.
68. La Serbie a programmé les élections pour la composition permanente du CSM, en l’absence cependant de toute préparation et consultation appropriées et transparentes. A la suite des difficultés rencontrées dans la préparation des élections des membres du CSM et du CNP, les autorités serbes ont décidé d'amender les lois et de préparer un cadre juridique plus approprié. Ces élections ont été finalisées en mars 2011, et observées par l'Union européenne et l'OSCE.
69. La Cour constitutionnelle, instituée en 2008, comprend 15 juges nommés pour un mandat de neuf ans renouvelable; sa composition reste politique 
			(41) 
			Cinq
juges sont nommés par le parlement, cinq par le Président de la
République et cinq par l’assemblée générale de la Cour suprême de
cassation.. Compte tenu de l’arriéré d’affaires auquel est confrontée la Cour constitutionnelle (8 549 affaires en attente au 15 septembre 2011 par rapport à 7 000 en septembre 2010) et de son peu d’efficacité, nous saluons les mesures prises en vue de réformer la cour et notons avec satisfaction que la Commission de Venise a été invitée à adopter un avis sur le projet de loi sur les modifications et les ajouts à la loi sur la Cour constitutionnelle de la Serbie 
			(42) 
			CDL-REF(2011)060. et encourageons les autorités serbes à prendre en compte les prochaines recommandations de la Commission de Venise dans son processus de révision de la législation.
70. Nous devons reconnaître qu’une réforme complète du système judiciaire a été entreprise. Toutefois, nous tenons à encourager les autorités serbes à poursuivre leurs efforts en vue de garantir l’indépendance du pouvoir judiciaire. Comme souligné par la Commission européenne en 2011, «le cadre constitutionnel et législatif se prête encore à une influence politique indue sur le judiciaire dans la mesure où le parlement nomme et destitue le président de la Cour suprême (qui est également le président ex officio du Conseil supérieur de la magistrature) et le procureur de la République pour un mandat de six ans renouvelable, sur proposition du gouvernement et en tenant compte de l’avis de la commission parlementaire compétente. Le parlement nomme également les présidents des tribunaux et les procureurs pour un mandat de six ans renouvelable sur la base des propositions non contraignantes formulées par les conseils respectifs, ainsi que les nouveaux juges et procureurs adjoints pour une période probatoire de trois ans. Le parquet est soumis aux influences politiques en raison de sa structure hiérarchique et de la pratique actuelle qui consiste à donner oralement des instructions en dépit de l’obligation légale d’une formulation écrite» 
			(43) 
			Conclusions
et recommandations de la Commission européenne sur la Serbie, op. cit., 12 octobre 2011. (traduction non officielle).

4.2. Renouvellement du mandat des juges et procureurs

71. La Commission de Venise a commenté les règles qui s’appliquent aux élections (réélections) générales des juges et procureurs. Des modifications supplémentaires ont toutefois été apportées ultérieurement et la question est devenue fortement politisée. Les élections générales ont été finalisées au 1er janvier 2010 et les autorités ont souligné le fait que la procédure reposait sur les critères de professionnalisme, de compétence et d’intégrité 
			(44) 
			Commentaires de la
délégation serbe du 30 novembre 2011..
72. Conformément à l’ensemble de lois adoptées précédemment sur la réforme du système judiciaire, le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) a décidé, en décembre 2009, de ne pas renouveler le mandat d'environ un tiers des juges serbes (plus de 800 sur 3 000). Par ailleurs, 150 procureurs sur 700 n'ont pas été réélus. Cette décision a été sévèrement critiquée par l’Association des juges de Serbie. Il a été notamment déclaré que la procédure au sein du CSM manquait de transparence et que le critère de confirmation des juges était plutôt politique.
73. L’Association des procureurs a également exprimé ses craintes quant au processus de renouvellement du mandat et a soumis des propositions concrètes au Conseil national des procureurs (CNP) sur la façon d’améliorer la procédure. Un accord passé avec le procureur de la République de Serbie en mars 2010 a permis aux procureurs non réélus de postuler pour des postes récemment créés de procureurs adjoints 
			(45) 
			Rapport final de la
DGHL(voir paragraphe 65 supra),
p. 34..
74. 827 juges dont le mandat n’avait pas été renouvelé ont interjeté appel des décisions prises par le CSM auprès de la Cour constitutionnelle. Certains des juges ont été renommés tandis que d’autres ont rejoint le Conseil du barreau. Dans un premier arrêt rendu en mai 2010, la Cour constitutionnelle a reconnu le bien-fondé de l’appel d’un juge et a ordonné au CSM de reconsidérer sa candidature en tant que juge de cour d’appel, estimant que la décision de mettre un terme à ses services ne se justifiait pas 
			(46) 
			Ibid.,
p. 35..
75. Afin d'alléger la charge de travail de la Cour constitutionnelle, la ministre de la Justice, Mme Snezana Malović, a annoncé que chaque décision concernant l'élection des juges serait revue par le CSM dès que ses membres permanents seront en place 
			(47) 
			V.I.P. Daily News Report,
no 4500, 7 décembre 2010.. Cette décision a été critiquée par l'Association des juges de Serbie, en raison du manque de transparence du mode de désignation des membres du CSM (il a été décidé par la suite que les membres ex officio du CSM ne siégeront pas lors de l'examen de ces dossiers) et des critères établis par le CSM et, de ce fait, du caractère arbitraire de la procédure 
			(48) 
			V.I.P., 25 mai 2011.. La délégation serbe a ajouté que la procédure d’élection des membres permanents du CSM et du CNP avait été lancée en novembre 2010 et avait tenu informé, dans les délais prescrits par la loi, l’ensemble des parties intéressées, par l’intermédiaire du Journal officiel mais également par le biais du site web et des tableaux d’affichage disponibles dans chaque tribunal 
			(49) 
			Commentaires de la
délégation serbe du 30 novembre 2011..
76. L'Association des juges serbes a toutefois contesté les «règles pour la mise en œuvre des décisions sur les critères et indicateurs et la révision des décisions de la première composition du Conseil supérieur de la magistrature concernant la cessation des fonctions judiciaires» adoptées le 23 mai 2011 par le CSM, à l'issue d'un processus de négociation facilité par la médiation du juge Reisner proposé par la Commission européenne. Nous notons que les décisions du CSM peuvent faire l'objet d'un recours devant la Cour constitutionnelle.
77. Le 15 juillet 2011, le CSM et le CNP ont initié la révision de la procédure des juges non désignés, qui devait être achevée en septembre 2011. La procédure de révision fait l'objet d'enregistrements audio. Elle est observée par le Conseil de l'Europe, l'OSCE et l'Union européenne.
78. L'Association des juges serbes a dénoncé le manque de transparence de la procédure, et la durée de cette procédure de révision: fin juillet 2011, le CSM avait auditionné 164 juges et statué sur 26 cas 
			(50) 
			Dix juges
ont été réintégrés, 10 cas ont été rejetés, 4 appels ont été rejetés
et, dans 2 cas, la procédure a été stoppée. V.I.P., 25 juillet 2011,
«Ten judges return to work». . 102 auditions étaient programmées pour le 12 août 2011. Dans une communication adressée le 25 juillet 2011 à plusieurs organisations internationales, l'Association des juges dénonce de plus le non-respect par le CSM de ses propres règles de fonctionnement.
79. La conduite objective et équitable de la procédure de révision a également été remise en cause par la Fondation néerlandaise Judges to Judges et l’Association des magistrats européens pour la démocratie et les libertés (MEDEL), qui ont observé le processus. Dans un courrier adressé au président Barroso de la Commission européenne, ces deux associations déplorent de graves dysfonctionnements (tant d’ordre matériel que procédural) et précisent qu’il faut s’attendre que les décisions prises selon cette procédure fassent l’objet de recours devant la Cour constitutionnelle et la Cour européenne des droits de l’homme, jetant ainsi une ombre sur le système judiciaire serbe dans les années à venir 
			(51) 
			Courrier
du 9 octobre 2011 adressé par MEDEL et la Fondation néerlandaise
Judges to judges au président de la Commission européenne, M. Barroso..
80. Au cours de notre visite en septembre 2011, des préoccupations ont par ailleurs été soulevées quant au rôle joué par les membres ex officio au sein du CSM dans les décisions relatives à la reconduction des juges. Ces membres ne disposent pas d’un droit de vote mais sont toutefois présents et peuvent par là même influer sur la décision finale.
81. Ces deux ONG ont en particulier souligné le fait que le CSM ne disposait plus de la majorité requise (c’est-à-dire 6 juges sur 11, en excluant ceux qui ont participé à la première composition du Conseil) pour prendre des décisions. La révocation de deux juges élus, M. Jaksic (à la suite de son arrestation et placement en détention depuis le 23 septembre 2011 pour une prétendue affaire d’abus de pouvoir remontant à plus de treize ans 
			(52) 
			La révocation de M.
Jaksic a été fortement remise en cause par l’Association des juges
serbes (qui a souligné que ce dernier détenait le meilleur score
en matière de traitement des plaintes) et le DSS (affirmant que
la révocation était à motivation politique, dans la mesure où M.
Jaksic avait été nommé au CSM par le gouvernement Kostunica). ) et le professeur Dimitrijevic (dont la fonction de doyen de la faculté de droit de Belgrade a été considérée par l'Agence de lutte contre la corruption comme donnant lieu à un conflit d’intérêts), suivie de la démission d'un troisième juge, M. Milimir Lukic, ont rendu difficile l’atteinte du quorum par le CSM.
82. Les derniers chiffres transmis le 18 novembre 2011 par le ministère de la Justice montrent que sur les 810 objections reçues, 640 entretiens ont été menés, 282 décisions ont été rendues dont 73 donnant satisfaction aux objections formulées par les candidats, 206 objections ont été rejetées et 3 affaires différées 
			(53) 
			Communication du ministère
de la Justice au Secrétariat du Conseil de l’Europe, 18 novembre
2011.. 127 décisions relatives à des procureurs avaient été prises à la mi-septembre 2011 
			(54) 
			Conclusions et recommandations
de la Commission européenne sur la Serbie, op.
cit., 12 octobre 2011..
83. Nous encourageons le CSM à achever cette procédure dans des délais raisonnables et dans le respect des normes européennes et des critères de compétence. La procédure de révision des juges et procureurs élus et non élus a constitué un processus long et hautement controversé. Il est de ce fait indispensable de garantir que des critères objectifs, incontestés et transparents guident l’achèvement du processus par le CSM, le CNP et la Cour constitutionnelle s’agissant de l’examen des recours introduits. La mise en place d’un système judiciaire indépendant fondé sur les normes européennes et non soumis à l’influence politique est une condition sine qua non pour garantir la confiance du peuple dans ses institutions judiciaires.

4.3. Autres développements législatifs récents ou en cours concernant le système judiciaire

84. Nous saluons l’adoption par l’Assemblée nationale du Code de procédure civile et du Code de procédure pénale (26 septembre 2011), de la loi sur l’exécution des décisions de justice et la sécurité (5 mai 2011), de la loi sur les notaires (5 mai 2011) et de la loi sur la profession d’avocat (5 mai 2011). La mise en œuvre effective de ces lois nouvellement adoptées devrait significativement réduire le nombre d’affaires portées en justice. La nouvelle loi sur l’exécution des décisions de justice et la sécurité devrait améliorer les procès et l’exécution des décisions et permettre de garantir qu’un procès n’excède pas deux ans 
			(55) 
			Commentaires de la
délégation serbe du 30 novembre 2011.. D’autres textes législatifs devront être adoptés et nous encourageons les autorités serbes à recourir à l’expertise du Conseil de l’Europe pour faire en sorte que ces nouvelles lois soient pleinement conformes aux normes du Conseil de l’Europe.
85. La révision du Code pénal est actuellement en préparation et nous invitons les autorités serbes à veiller à sa conformité avec les normes du Conseil de l’Europe, notamment les recommandations formulées par le GRECO.
86. Des programmes de formation initiale et continue sont dispensés par l'Académie judiciaire depuis le 1er janvier 2010 et des formations spécialisées sont proposées en matière de délinquance juvénile ou de droit de la famille. Des formations continues sont également proposées s’agissant de la confiscation de biens dérivant d'activités criminelles, de crime organisé, de corruption et de blanchiment d'argent 
			(56) 
			Information
fournie par le parlement, feuille de route, mars 2011..
87. La loi sur la propriété publique et la loi sur la restitution des biens 
			(57) 
			La loi
régit les droits des personnes physiques et morales dont les biens
ont été confisqués après le 9 mars 1945 sur le territoire de la
République de Serbie, de par l’application des réglementations sur
la réforme agraire, les nationalisations, les confiscations et autres,
et devenus propriétés privées, nationales, de l'Etat, sociales ou
coopératives. La loi régit de façon complète la question des biens
confisqués. Informations fournies par la délégation serbe dans ses commentaires
du 30 novembre 2011. confisqués après la seconde guerre mondiale – requises par la Commission européenne pour l’obtention du statut de candidat – ont été adoptées en septembre 2011, bien qu’elles restent des sujets sensibles. Le 24 novembre 2011, le parlement a décidé de modifier sa loi sur la restitution des biens nationalisés entre la prise de pouvoir par les communistes en 1945 et l’année 1968 (ou le versement d’une indemnisation équivalente), afin de contrer les objections de la Hongrie, qui aurait pu compromettre la demande de la Serbie du statut de pays candidat à l'adhésion à l'Union européenne 
			(58) 
			Le
projet de loi prévoyait au départ d’exclure les personnes qui avaient
servi dans l’une des forces armées qui ont occupé la Serbie durant
la seconde guerre mondiale, ainsi que leurs descendants. Bojana
Barlovac, <a href='http://www.balkaninsight.com/en/article/serbian-parties-agree-on-disputed-rehabilitation-act'>Serbia
meets Hungarian complaints in restitution,</a><a href='http://www.balkaninsight.com/'>www.balkaninsight.com</a>, 24 novembre 2011..
88. La loi sur la restitution de biens appartenant aux églises et communautés religieuses adoptée en 2006 pose toujours problème: elle continue d'établir une distinction entre les Eglises et les communautés religieuses «traditionnelles» et les Eglises et les communautés religieuses non traditionnelles, et ne prévoit toujours que la restitution des biens confisqués en 1945 ou ultérieurement, ce qui continue de poser un problème aux communautés juive et islamique qui ont été dépossédées de biens avant 1945 
			(59) 
			Rapport de l'ECRI sur
la Serbie (4e cycle de monitoring), adopté
le 23 mars 2011 et publié le 31 mai 2011, CRI(2011)21, paragraphe
12.. Avec l'ECRI, nous encourageons les autorités serbes à modifier cette disposition et à veiller à l'application de cette loi 
			(60) 
			Les
représentants des communautés orthodoxe, juive et catholique déplorent
pour leur part l'absence de mise en œuvre de la loi sur les églises
(qui prévoit la restitution des biens), et se déclarent préoccupés
par les déclarations du Vice-Premier ministre portant sur les conséquences
économiques de ces restitutions, V.I.P., 22 juillet 2011, «Government Criticized
by Churches Due to Property not Returned Yet»..
89. Il faut également saluer l'adoption de la loi sur la réhabilitation le 5 décembre 2011, à la suite de l’accord avec l’Alliance des Hongrois de Vojvodine, qui aborde, entre autres, les préoccupations spécifiques de la minorité hongroise quant à la loi sur la restitution.
90. Nous avons également appris avec satisfaction la création d’une commission parlementaire de suivi des prisons chargée de suivre l'exécution des décisions pénales, conformément à l’article 278 de la loi sur l’exécution des sanctions pénales. Une commission composée de cinq membres du parlement contrôlera l’exécution des sanctions pénales et veillera à l’amélioration des conditions de vie, du traitement et de la protection des personnes purgeant une peine d’emprisonnement. Cette commission devrait soumettre un rapport à l’Assemblée nationale et a proposé des amendements législatifs afin de renforcer la protection des droits des détenus. Elle sera habilitée à requérir des informations auprès des autorités pertinentes et d’ONG indépendantes, de visiter des centres de détention et préparera son rapport. Nous estimons que la création de cette commission est un exemple positif de contrôle parlementaire.

5. Droits de l’homme

5.1. Prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants

91. Une délégation du Comité pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) du Conseil de l’Europe a effectué sa troisième visite périodique en Serbie du 1er au 11 février 2011. Elle a pu examiner les progrès accomplis depuis sa dernière visite en 2007 ainsi que les mesures prises en vue d'appliquer les recommandations du Comité, notamment en matière de détention par la police, d'emprisonnement et de garanties juridiques pour les patients en établissements psychiatriques. La délégation a également effectué une visite de suivi à l'unique hôpital pénitentiaire du pays, ainsi qu'à l'hôpital psychiatrique spécial Dr Laza Lazarević de Belgrade. En outre, elle s'est rendue pour la première fois à la prison pour femmes de Požarevac, à l'hôpital psychiatrique spécial de Gornja Toponica et à l'Institution éducative pour mineurs de Niš. A l’issue de la visite, la délégation a présenté ses observations préliminaires aux autorités serbes 
			(61) 
			Visite
du Comité antitorture du Conseil de l'Europe en Serbie, 15 février
2011, <a href='http://www.cpt.coe.int/'>www.cpt.coe.int</a>..
92. Dans l'attente de la publication du rapport par le CPT en 2012, nous encourageons les autorités serbes à poursuivre leur collaboration avec le CPT et à autoriser, le moment venu, la publication du rapport.
93. Nous saluons également l'adoption, le 28 juillet 2011 par le parlement, de la loi complétant la loi de ratification du Protocole optionnel de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants des Nations Unies.

5.2. La situation des médias

94. Au cours de nos visites en Serbie, plusieurs problèmes concernant les médias nous ont été rapportés. Les médias serbes, comme ceux de nombreux autres pays, sont confrontés à des défis économiques qui peuvent mettre en danger le pluralisme et la liberté des médias. En particulier, la propriété des médias pose aujourd'hui problème, mais aussi le rôle de l'Etat dans le paysage médiatique, la viabilité économique des médias, la transparence en matière de propriété des médias et du fonctionnement de l'agence nationale de télécommunication, la numérisation des moyens de communication, etc.
95. Dans son rapport d’octobre 2011 sur «les pressions exercées et le contrôle des médias en Serbie 
			(62) 
			Des extraits de ce
rapport ont été publiés par V.I.P. le 5 octobre 2011.», le Conseil (gouvernemental) de lutte contre la corruption a publié les résultats d’une enquête menée de janvier 2008 à juin 2010 aux fins de déterminer la manière dont les organes gouvernementaux influent sur les médias. Le Conseil de lutte contre la corruption a conclu que:
  • il n’existe aucun média offrant au public des informations complètes et objectives, du fait des fortes pressions exercées par les cercles politiques; certains événements sont passés sous silence ou rapportés de manière incomplète et sélective;
  • s’agissant des 30 principaux organes de médias (12 quotidiens, 7 hebdomadaires, 6 chaînes de télévision et 5 stations de radio), la propriété de 18 d’entre eux manque de clarté et les véritables propriétaires sont inconnus du grand public;
  • parallèlement aux 15 millions d’euros perçus au titre de la publicité et de la promotion, les médias bénéficient, au travers d’un appel d’offre public, d’une enveloppe supplémentaire de 21 à 25 millions d’euros, selon les sources (…). Il s’avère que les médias reçoivent près d’un quart de leurs revenus d’institutions gouvernementales. Les agences de relations publiques, de marketing et de production jouent un rôle particulier dans le financement des médias et les placent en situation de dépendance économique. Ils sont pour la plupart aux mains de militants de partis ou de personnes liées à ces partis. Les organes gouvernementaux exercent une influence particulière au travers de la RTS qui, loin d’être un service public, sert les structures politiques étroitement liées aux dirigeants des partis au pouvoir.
96. La loi sur les communications électroniques, adoptée par le parlement le 28 juin 2010, a soulevé de sérieuses préoccupations: cette loi aurait autorisé les services secrets à avoir accès aux informations privées disponibles dans les communications électroniques sans autorisation préalable d’un tribunal. Le médiateur a déposé une plainte auprès de la Cour constitutionnelle, qui a déclaré cette loi anticonstitutionnelle à partir de juillet 2010. Toutefois, lors de notre visite en décembre 2010, nous avons été informés que la publication de cette décision au Journal officiel avait été retardée (pour des problèmes de personnel, selon le médiateur) et, de ce fait, cette loi, bien que non appliquée, était restée en vigueur jusqu'à sa publication en novembre 2010, ce qui suscitait une insécurité juridique, en particulier parmi les journalistes.
97. La loi sur l’information publique adoptée en 2009 a également été perçue par les journalistes comme une pression supplémentaire 
			(63) 
			Voir la position de
la Fédération internationale des journalistes, <a href='http://www.ifj.org/en/articles/ifj-opposes-repressive-amendments-to-media-law-in-serbia'>www.ifj.org/en/articles/ifj-opposes-repressive-amendments-to-media-law-in-serbia</a>.. La plupart de ses dispositions – y compris celles autorisant des amendes disproportionnées pour diffamation – ont été annulées par la Cour constitutionnelle à l’initiative du médiateur en juillet 2010.
98. Par ailleurs, plusieurs incidents et actes de violence ont été signalés: le 15 avril 2011 par exemple, plusieurs individus, proférant des insultes nationalistes et d'extrême droite, ont attaqué Csaba Szögi, un journaliste du quotidien en langue hongroise Magyar Szó basé à Novi Sad 
			(64) 
			Communiqué de l'Organisation
des médias du Sud-Est de l'Europe (SEEMO/IPI) du 19 avril 2011.. Deux journalistes de la télévision B92, Vera Matić, directeur en chef, et Brankica Stankovic, journaliste d'investigation, vivent en permanence sous protection policière, tout comme Valdimir Mitric, journaliste à Vecernje Novosti, battu en 2005 par un policier. L'Organisation des médias du Sud-Est de l'Europe (SEEMO/IPI) a aussi déploré la lenteur des juridictions à agir contre les auteurs d'attaques contre des journalistes, ou d'assassinats de journalistes, notamment Slavko Curuvija (1999), Milan Pantic (2001), Dada Vujasinovic (1994), à propos duquel la thèse officielle concernant son suicide est aujourd'hui remise en cause 
			(65) 
			Contribution
du SEEMO intitulée «Press freedom in the West Balkans and Turkey»
lors de la Conférence «Speak Up» organisée par la Commission européenne
le 6 mai 2011 à Bruxelles..
99. Les journalistes déplorent également les sanctions insuffisantes infligées en cas d'agressions physiques contre des journalistes, qui ne permettent pas de dissuader les auteurs de ces violences: au terme d'un procès qui a duré trois ans, l'auteur de l'agression du cameraman de B92 Boško Branković a été condamné à une assignation à résidence de dix mois 
			(66) 
			Communiqué
du SEEMO/IPI du 13 mai 2011.. Vera Matić relevait que le Code pénal punit plus sévèrement les menaces (non matérialisées) contre des journalistes (un à huit ans de prison) que les agressions contre les journalistes (six mois à cinq ans de prison).
100. Comme attendu, la nouvelle «Stratégie pour le développement d’un système d’information publique en République de Serbie jusqu’à 2016» (Stratégie médias) a été adoptée le 26 septembre 2011 par le gouvernement, après un processus de deux ans impliquant les médias et les associations de journalistes, les conseils des minorités nationales, les pouvoirs publics et des organisations internationales. La stratégie – un document non contraignant – établit les bases de la définition de nouveaux concepts, par exemple l’intérêt public dans le domaine de l’information et l’applicabilité des dispositions relatives aux aides d’Etat au financement des médias. La stratégie devrait permettre un financement plus transparent et équilibré des programmes d’intérêt public, une réduction des distorsions sur le marché des médias causées par le financement public de ces derniers, et favoriser la production de programmes de meilleure qualité à l’intention des citoyens.
101. Cependant, les journalistes que nous avons rencontrés en septembre 2011 se sont dits fort préoccupés par la possibilité envisagée dans la stratégie de créer six radiodiffuseurs de service public régionaux, alors que les financements étaient déjà insuffisants pour les deux radiodiffuseurs de service public existants. Ils ont également souligné que les financements publics alloués à ces radiodiffuseurs régionaux risquent d’entraver l’indépendance des comités éditoriaux.
102. La Stratégie médias est à considérer comme une étape positive, mais il semble que certains points n’aient pas été suffisamment creusés, tels que les dispositions relatives aux aides d’Etat et les exceptions, la réglementation relative à la concentration des médias, etc. C’est pourquoi nous invitons instamment les autorités serbes à veiller à la conformité avec les normes européennes de la législation qui devra être adoptée pour mettre en œuvre la Stratégie médias et encourageons la Serbie à recourir à l’expertise du Conseil de l’Europe dans ce domaine.
103. Pour l'heure, nous saluons les amendements à la loi sur l’accès libre aux informations d'importance publique adoptés par le parlement en avril 2010 – qui permettront au Commissaire pour la protection de la liberté d'accès aux informations d'intervenir en cas de violation de la loi 
			(67) 
			CommDH
007(2011)..
104. Par ailleurs, nous nous réjouissons de l'annonce faite par le Secrétaire d’Etat au ministère de la Justice de décriminaliser la diffamation et la calomnie, conformément aux positions de l'Assemblée parlementaire 
			(68) 
			Résolution 1577 (2007) «Vers une dépénalisation de la diffamation».. Cette incrimination, comme le rappelle la SEEMO/IPI, a souvent été utilisée contre les journalistes en Serbie – y compris lorsqu'ils citent des déclarations officielles par des personnalités politiques ou des leaders de partis politiques, ce qui a conduit certains journalistes à pratiquer l'autocensure. Le Commissaire aux droits de l’homme a estimé que l’existence même de dispositions pénales relatives à la diffamation intimide les journalistes et engendre une censure regrettable 
			(69) 
			CommDH(2011)29..
105. Nous étions également préoccupés par les sanctions pécuniaires disproportionnées qui peuvent être infligées lors de procédures civiles, et qui mettent en danger la survie économique des médias et donc la liberté d'expression, une mesure qui touche plus particulièrement le journalisme d'investigation traitant de sujets sensibles. C’est pourquoi nous saluons les décisions de la Cour constitutionnelle du 22 juillet 2010 et du 5 mai 2011, qui ont conclu à l’inconstitutionnalité des dispositions des amendements à la loi sur l’information publique, relatives aux sanctions pécuniaires disproportionnées infligées en cas de diffamation aux journalistes et responsables des médias, ainsi que les dispositions enfreignant les droits à la liberté de pensée et d’expression. Les journalistes et associations de la presse se sont également félicités de ces décisions. Nous encourageons les autorités serbes à veiller à ce que la future législation relative aux médias renforce la liberté d’expression et des médias et intègre pleinement les normes du Conseil de l’Europe et la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme.
106. Nous appelons les autorités serbes à prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger efficacement les journalistes, à lutter contre l'impunité des auteurs de violences à l'égard des journalistes, à poursuivre, avec diligence, et sanctionner les auteurs de menaces et d'agressions contre les représentants des médias et à modifier le Code pénal pour renforcer la protection des journalistes et des représentants des médias. Il convient toutefois de noter qu'un amendement du Code pénal sur les «postes d'importance significative» (dans les secteurs de l'information publique, de la santé publique, de l'éducation, des transports publics, etc.) permet d'octroyer une protection légale spéciale dans le cadre de l'exercice de ces missions, et de prévoir des sanctions plus sévères 
			(70) 
			Feuille de route du
parlement, mars 2011, p. 12..

5.3. Lutte contre la corruption

107. Nous saluons les actions entreprises par la Serbie pour combattre la corruption. Cet effort a également été souligné par le Groupe d’Etats contre la corruption (GRECO) qui, dans son rapport d’évaluation du Troisième Cycle sur la Serbie, a constaté que la législation pénale serbe était conforme à la Convention pénale du Conseil de l'Europe sur la corruption (STE no 173) et que la Serbie était engagée dans un processus de réforme prometteur visant à améliorer la responsabilité dans le domaine du financement des partis politiques. Le GRECO a adressé 15 recommandations au total à la Serbie, concernant les infractions de corruption d’arbitres, la capacité à poursuivre la corruption à l’étranger, la détection, l’investigation et la poursuite des faits de corruption, la condamnation non seulement des infractions mineures en matière de corruption mais également des faits de corruption de haut niveau commis dans le secteur public, une vigilance accrue en matière de trafic d'influence et de corruption dans le secteur privé, la vérification des comptes des partis, la sanction des pratiques illicites, la réglementation des dons en espèces et en nature et l’accès du public aux informations, y compris les rapports des partis politiques sur leur situation financière 
			(71) 
			Rapport
d’évaluation sur la République de Serbie, Greco Eval III Rep (2010)
3F, thème I et thème II, 1er octobre 2010, <a href='http://www.coe.int/greco'>www.coe.int/greco</a>..
108. Les progrès en matière de lutte contre la corruption se sont poursuivis avec l'action de l’Agence de lutte contre la corruption à partir de janvier 2010. L'agence a notamment élaboré une base de données des déclarations de patrimoine des représentants publics, adopté des décisions en matière de conflits d'intérêt et des lignes directrices sur l'évaluation des risques de corruption dans les instances publiques. De nombreux agents publics ont soumis, comme exigé, des déclarations de ressources à la nouvelle agence. Toutefois, la corruption reste courante dans de nombreux domaines (en particulier la justice et le système de santé) et demeure un sérieux problème.
109. Dans le même temps, nous sommes fort préoccupés après la publication du rapport annuel 2011 de l’ONG Transparency International (TI), où la Serbie a glissé de la 78e à la 86e position dans l’indice de corruption. Selon TI Serbie, la lenteur de la réforme du système judiciaire, l’affaiblissement des institutions et l’absence de tout contrôle exercé sur des partis politiques considérés par TI comme des «générateurs de corruption» sont les principales raisons expliquant un niveau aussi élevé de corruption dans le pays. Les violations de la législation anticorruption, l’adoption de réglementations contradictoires, la mise en œuvre discrétionnaire de la législation, le processus de lobbying non réglementé et l’adoption de règlements légaux en l’absence de toute transparence ne font que contribuer à la propagation de la corruption 
			(72) 
			V.I.P.,
2 décembre 2011..
110. Nous avons tenu une série de réunions axées sur la lutte contre la corruption. A partir des informations recueillies auprès des ONG et du Conseil de lutte contre la corruption, et des explications que nous a fournies l’Agence de lutte contre la corruption, nous avons constaté que ce phénomène reste largement répandu. Nous avons pris note qu’un certain nombre d’affaires bien connues d’anciens responsables des secteurs de la santé, du système judiciaire et de l’énergie ont été portées en justice au cours des derniers mois.
111. Nous sommes heureux de constater que le Code de procédure pénale révisé et la loi sur le financement des activités politiques confieront à l’Agence de lutte contre la corruption un rôle prépondérant. C’est pourquoi il est essentiel que cette agence soit dotée de moyens suffisants pour lui permettre de contrôler la mise en œuvre effective des lois et d’appliquer des sanctions en cas de violations – notamment de la loi sur le financement des activités politiques.
112. Nous avons également été impressionnés par le travail mené par le Conseil anticorruption, un organe d'Etat créé en 2001. L’expertise de ce conseil mériterait d’être davantage prise en compte dans les efforts déployés par les autorités serbes pour lutter contre la corruption. La poursuite des affaires avérées ou alléguées de corruption portées à l’attention du procureur et de l’Agence de lutte contre la corruption – que ce soit par le Conseil anticorruption ou des ONG – reste une question ouverte.
113. Nous encourageons les autorités serbes à se conformer aux recommandations du GRECO et à renforcer ainsi leur dispositif de lutte contre la corruption. Nous saluons à cet égard l'adoption de la loi sur le financement des partis politiques le 14 juin 2011, qui reprend largement les recommandations de la Commission de Venise 
			(73) 
			CDL-AD(2011)006, avis
conjoint de la Commission de Venise et de l'OSCE sur le projet de
loi révisé sur le financement des activités politiques de la République
de Serbie, 30 mars 2011.. Cette loi devrait améliorer la transparence du financement des partis politiques et des campagnes électorales et renforcer le rôle de l'Agence de lutte contre la corruption.
114. D'autres avancées législatives ont été réalisées dans le domaine de la lutte contre la corruption: élargissement de la définition des agents auxquels s'applique la loi anticorruption aux juges et procureurs; élargissement des compétences du Bureau du Procureur spécial pour le crime organisé en matière de faits criminels dans l'exercice de fonctions officielles aux employés exerçant des fonctions publiques 
			(74) 
			Amendements
à la loi de septembre 2009 sur l'organisation et les compétences
des institutions d’Etat chargées de la suppression du crime organisé
(Organization and Competence of State Bodies in Suppression of Organized
Crime)., amendement du Code pénal en matière de blanchiment d'argent et de lutte contre le terrorisme en septembre 2009.
115. Nous notons aussi que la loi sur la confiscation des biens acquis de manière criminelle a été déclarée conforme à la Constitution par la Cour constitutionnelle le 30 juin 2011 
			(75) 
			V.I.P., 1er juillet
2011, «Constitutional Court: Law on Seizing Property Acquired through
Criminal Acts Is Not Unconstitutional»..
116. D'autres mesures et activités sont envisagées par le parquet et le parquet chargé du crime organisé, concernant la mise en place d'unités spécialisées du parquet pour poursuivre les cas de corruption, y compris au sein du parquet par l'adoption de plans d'intégrité découlant des directives de l'Agence de lutte contre la corruption, les formations spécialisées, le renforcement de la coopération interinstitutionnelle avec les autres organes publics chargés de la lutte contre la corruption, etc. 
			(76) 
			Feuille de
route du parlement, mars 2011..
117. Nous encourageons les autorités serbes à poursuivre la lutte contre la corruption, à élaborer et à mettre en œuvre une stratégie efficace de lutte contre la corruption, et à donner à l'Agence de lutte contre la corruption les moyens de mettre en œuvre ces politiques et d'obtenir des résultats. Le nombre de condamnations définitives, en particulier dans les affaires de haut niveau, reste faible. Les marchés publics, la privatisation et les dépenses publiques restent des sujets de préoccupation. Nous saluons les efforts entrepris par le parquet pour vérifier la conformité de la privatisation controversée d'une vingtaine d'entreprises, concernant par exemple la Compagnie du port de Belgrade ou le quotidien Vecernje Novosti 
			(77) 
			V.I.P.,
20 juin 2011, «EC Asking Serbia to Review Privatization of over
20 Companies»..
118. Il nous semble par ailleurs indispensable de renforcer la protection des personnes dénonçant des abus 
			(78) 
			Voir également la Communication
de la Commission au Parlement européen et au Conseil «Stratégie d’élargissement
et principaux défis 2010-2011», COM(2010)660 final.. Nous notons avec intérêt l'élaboration de règles par l'Agence de lutte contre la corruption sur la protection des personnes rapportant des cas de suspicion de corruption dans le secteur public 
			(79) 
			V.I.P., «There is no
System Protection for Those who Report Corruption», 14 juillet 2011.. Nous invitons les autorités serbes à établir, sur cette base, un système de protection efficace et effectif pour les «donneurs d'alerte» concernant non seulement les agents du secteur public, mais aussi les employés du secteur privé.

5.4. Réfugiés et demandeurs d'asile

119. Dans sa Résolution 1661 (2009), l'Assemblée invitait la Serbie à poursuivre les travaux pour garantir aux réfugiés et aux personnes déplacées, dans la mesure du possible, un retour durable, sûr et dans de bonnes conditions, et à ne ménager aucun effort pour trouver des solutions durables pour ceux qui ont décidé de rester en Serbie (paragraphe 16.6.14).
120. Le Commissaire aux réfugiés de la République de Serbie a indiqué que 700 000 personnes (soit 10% de la population) ont trouvé refuge en Serbie à la suite des conflits en ex-Yougoslavie. Il y avait en 2010 près de 65 000 réfugiés (dont 45 000 vivant en dessous du seuil de pauvreté) et plus de 210 000 personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays (PDI). 3 358 personnes, qualifiées de «groupe très vulnérable» par le Commissaire aux droits de l'homme à l'issue de sa dernière visite en Serbie 
			(80) 
			CommDH 007(2011)., vivaient dans 54 centres collectifs. Le nombre de PDI qui sont retournées au Kosovo est très faible (12 145 entre 2000 et 2009 selon le bureau du HCR de Pristina) 
			(81) 
			Evaluation
des besoins des personnes déplacées dans leur propre pays en République
de Serbie (PDI) (Assessment of the need of internally displaced
persons in the Republic of Serbia), 
			(81) 
			<a href='http://www.kirs.gov.rs//docs/Assessment_of_the_Needs_of_IDPs_in_Serbia.pdf'>www.kirs.gov.rs//docs/Assessment_of_the_Needs_of_IDPs_in_Serbia.pdf</a>, février 2011, Bureau des statistiques de la Serbie. .
121. Nous encourageons les autorités serbes à poursuivre leurs programmes d'intégration en vue de trouver des solutions durables pour ces personnes, d'assurer leur accès aux droits sociaux et économiques et, dans le cas des PDI, à promouvoir un retour ou un accès à leurs biens abandonnés dans le cadre des négociations actuelles entre Belgrade et Pristina.
122. A cet égard, nous sommes d’avis que l’organisation de la Conférence ministérielle sur la question des réfugiés dans les Balkans, tenue à Belgrade le 7 novembre 2011, à l’initiative de l’envoyé personnel du haut-commissaire des Nations Unies chargé de régler les problèmes de déplacement prolongé de populations dans les Balkans occidentaux, qui fait suite à la «Conférence sur les solutions durables pour les réfugiés et les personnes déplacées à l'intérieur du pays: coopération entre les Etats de la région» organisée par la Serbie en mars 2010 et le Monténégro en juin 2010, pourrait réactiver la mise en œuvre de la «Déclaration de Sarajevo», signée en 2005. Nous félicitons les ministres des Affaires étrangères de Serbie, de Bosnie-Herzégovine, de Croatie et du Monténégro pour la signature d’une déclaration commune le 14 novembre 2011 dans laquelle ils expriment leur soutien à un plan de travail fixant des étapes concrètes pour supprimer les obstacles qui entravent l’atteinte d’une solution durable pour les derniers réfugiés du conflit de 1991-1995 et appellent à redoubler d’efforts pour régler le sort des plus anciens réfugiés d’Europe. Cet accord devrait accélérer la délivrance des documents d’état civil permettant aux réfugiés et aux rapatriés de jouir pleinement et effectivement de leurs droits et de retrouver une vie normale. Nous appelons tous les donateurs à soutenir le programme régional et ses objectifs au cours des cinq prochaines années afin de trouver des solutions d’hébergement pour les personnes vivant actuellement dans des centres collectifs et autres personnes vulnérables, y compris les détenteurs d'anciens droits de propriété 
			(82) 
			<a href='http://www.unhcr.org/'>www.unhcr.org</a>..
123. Notre attention s'est également portée sur le nombre croissant de demandeurs d'asile en Serbie. Selon les informations du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), 28 900 demandes d'asile émanant de la Serbie ont été enregistrées en 2010, soit une augmentation de 54% par rapport à l'année précédente 
			(83) 
			Les demandeurs d'asile
de Serbie représentaient 8% de l'ensemble des demandes d'asile introduites
dans les pays industrialisés. 80% des pays de destination distinguent
les demandeurs d'asile en provenance du Kosovo. Selon l'UNHCR, 45%
des demandes enregistrées dans ces pays émanent de personnes venues
du Kosovo (contre 74% en 2009). Chiffres du HCR, cités dans l'édition
du média électronique V.I.P. du 29 mars 2011.. La Serbie a ratifié la Convention de Genève de 1951 relative au statut des réfugiés le 12 mars 2001.
124. Nous tenons à remercier les autorités serbes pour toutes les informations qu’elles nous ont fournies à propos de la loi sur l’asile no 109/07, qui régit le statut des réfugiés, la protection subsidiaire et la protection temporaire accordées aux demandeurs d’asile. L’octroi du droit d’asile est soumis à une procédure administrative en deux phases. La décision en première instance est prise par le Bureau de l’asile (qui fait partie du ministère de l’Intérieur), alors que la Commission d’asile a compétence pour trancher en deuxième instance. Deux centres d’asile sont en activité en Serbie, à Banja Koviljaca et à Bogovadja.
125. Nous avons été informés qu’entre janvier et novembre 2011, 2 731 personnes ont exprimé leur intention de demander l’asile en Serbie 
			(84) 
			Ces personnes
viennent pour l’essentiel d’Afghanistan, d’Irak et de quelques pays
africains.. 178 requêtes ont été soumises mais aucune n’a été satisfaite: 37 requêtes (concernant 68 demandeurs d’asile – car une demande unifiée est impérative pour les membres d’une même famille) ont été refusées (au motif que les demandeurs étaient arrivés de pays tiers sûrs), deux requêtes ont été rejetées, 95 requêtes (concernant 124 personnes) ont été suspendues, car leur nouvelle résidence sur le territoire serbe était inconnue (selon la loi, une personne doit informer les autorités de sa nouvelle adresse dans un délai de trois jours suivant son changement de résidence). Les autorités serbes ont également reconnu que les ressources humaines en place étaient insuffisantes et ne permettaient pas au Service de l’asile de mener tout l’éventail de ses activités de manière prompte et efficace. La nouvelle classification des postes au sein du ministère de l’Intérieur devrait résoudre les difficultés existantes. Le Service de l’asile actuel devrait être transformé en un Bureau de l’asile qui serait une entité organisationnelle séparée, placée sous l’égide de la police des frontières et dotée de plus de personnel.
126. Notre attention a également été attirée par les mesures prises par le ministère de l’Intérieur pour lutter contre l’arrivée massive de faux demandeurs d’asile qui ont quitté la Serbie pour se rendre dans des pays de l’Union européenne en 2010 
			(85) 
			En 2010, la Suède a
reçu 7 900 demandes d’asile émanant de personnes venues de Serbie,
alors que l’Allemagne et la France en ont reçu respectivement 6 500
et 5 800. Quasiment toutes les demandes ont été refusées. Le Commissaire
aux droits de l’homme note que les Roms sont surreprésentés dans
cette catégorie., après la libéralisation du régime des visas 
			(86) 
			Le
23 mai, le ministre de l’Intérieur Ivica Dacić a annoncé le durcissement
des contrôles aux frontières et l’obligation pour les ressortissants
serbes voyageant vers un pays membre de l’Union européenne d’être
en possession d’un billet de retour, d’une assurance voyage et de
moyens financiers suffisants. V.I.P., 24 mai 2011.. Une Commission pour le suivi des voyages sans visas vers l’Union européenne a été créée en février 2011. Une réglementation détaillée sur l’exercice des pouvoirs des agents de la police des frontières et les devoirs des personnes franchissant la frontière de l’Etat a été adoptée le 2 juin 2011. Plusieurs des actions entrant dans le champ de ses activités ont trait à la réduction du nombre de faux demandeurs d’asile, notamment par un contrôle renforcé des passagers quittant le pays et se rendant dans des pays de l’espace Schengen; la collecte de données relatives aux organisateurs potentiels de voyages vers les pays de l’Union européenne et la lutte contre les groupes organisés de faux demandeurs d’asile; l’adoption d’une stratégie de réintégration des rapatriés sur la base d’un accord de réadmission; l’adoption d’une stratégie nationale pour l’amélioration du statut des Roms; la prévention de la falsification des documents soumis lors d’une demande de visa pour les pays de l’Union européenne 
			(87) 
			Commentaires de la
délégation serbe du 30 novembre 2011..
127. Nous comprenons que la Serbie souhaite honorer ses engagements souscrits au titre du régime de libéralisation des visas et éviter les abus. Cependant, il nous faut attirer l’attention des autorités serbes sur le fait que les mesures prises devraient être pleinement conformes avec les normes du Conseil de l’Europe et ne pas enfreindre le droit des personnes à quitter leur pays 
			(88) 
			L’article 2 du Protocole
n° 4 de la Convention européenne des droits de l’homme (ratifié
par la Serbie le 3 mars 2004) se lit comme suit: «Toute personne
est libre de quitter n'importe quel pays, y compris le sien».. Des abus dans le contexte des régimes de libéralisation des visas ont été relevés dans d’autres pays de la région. Les dispositions prises pour combattre ce phénomène se terminent et nous souhaitons souligner le commentaire publié par le Commissaire aux droits de l’homme et intitulé «Le droit de quitter son pays doit s’appliquer sans discrimination». Nous partageons l’avis du Commissaire selon lequel l’augmentation du nombre de demandes d’asile dans certains pays n’est pas le fond du problème, mais son symptôme. Elle est un signe de plus de l’échec de l’Europe à vaincre le cycle de l’antitsiganisme, de la discrimination et de la marginalisation des populations roms 
			(89) 
			Voir <a href='http://www.commissioner.coe.int/'>www.commissioner.coe.int</a>, 22 novembre 2011.

5.5. Liberté d'association

128. Le parlement a adopté en juillet 2009 une loi sur les associations et créé en avril 2010 le Bureau pour la coopération avec la société civile. Toutefois, ce bureau n'est pas encore opérationnel et la coopération entre les autorités et la société civile reste déséquilibrée 
			(90) 
			Feuille
de route du parlement, mars 2011, p. 5..
129. La Commission de Venise et l’OSCE/BIDDH ont préparé un avis conjoint relatif à la loi sur les manifestations publiques en octobre 2010 (CDL-AD (2010) 031) et ont relevé certaines lacunes. Les principales recommandations portent sur le titre de la loi, les règles de notification, l’application de la loi à la fois aux nationaux et aux non-nationaux et autres catégories de personnes, le retrait des restrictions globales sur l’heure et le lieu, la limitation des motifs pour la suspension, l’interdiction ou la dissolution des réunions. Nous invitons la Serbie à adopter cette loi en tenant compte des recommandations de la Commission de Venise.

5.6. Service civil alternatif

130. Dans sa Résolution 1661 (2009), l'Assemblée avait regretté que la législation sur le service alternatif et les objecteurs de conscience n’ait pas encore été adoptée (paragraphe 16.6.2). Nous saluons donc l'adoption par le parlement le 26 octobre 2009 de la loi sur le service civil régissant les questions relatives à l'objection de conscience et au service civil alternatif.

6. Droits des minorités nationales et lutte contre les discriminations

6.1. Tendance générale

131. De nombreuses avancées positives sont à noter dans le domaine de la lutte contre la discrimination. Nous renvoyons à cet égard au rapport publié le 31 mai 2011 par la Commission européenne contre le racisme et l'intolérance (ECRI), qui souligne les avancées institutionnelles et législatives, en particulier l'adoption d'une loi antidiscrimination en mars 2009.
132. Nous saluons l’élection par le parlement, en application de la loi sur l’interdiction de la discrmination, de Mme Nevena Petrešić, première Commissaire à l’égalité. Cette institution est appelée à devenir l'instance clé en matière de protection des droits des minorités et de promotion de la mise en œuvre complète de la loi sur la nondiscrimination. Elle devra être dotée de moyens adéquats pour renforcer la lutte contre le racisme et l’antisémitisme et, tout comme l'ECRI 
			(91) 
			CRI(2011)21,
p. 15 et 35., nous considérons comme prioritaire le renforcement des capacités du Bureau du Commissaire à l'égalité.
133. Cependant, les discriminations que subissent certains groupes spécifiques doivent être traitées de manière plus effective encore par les autorités serbes (voir infra).
134. Des améliorations sont encore possibles dans la poursuite et l’incrimination des discours de haine. Le Commissaire aux droits de l’homme a souligné que l’actuelle législation pénale ne contient pas de disposition spécifique sur le discours de haine. Elle n’aborde que l’infraction pénale d’incitation à l’intolérance ou à la haine nationale, raciale ou religieuse, qui ne couvre cependant pas toutes les formes de discours de haine prévues par la Recommandation no R (97) 20 du Comité des Ministres du Conseil de l’Europe sur le «discours de haine». La loi sur l’information publique et la loi sur l’interdiction de la discrimination contiennent des dispositions sur le discours de haine. L’ECRI a exprimé en 2011 ses préoccupations devant la lenteur de la mise en œuvre des dispositions pertinentes, rares étant les poursuites engagées à ce jour comparativement à la fréquence alléguée des discours de haine, y compris dans les médias 
			(92) 
			Comm DH(2011)29, 22
septembre 2011..
135. Nous encourageons vivement la Serbie à mettre en œuvre toutes les mesures en matière de prévention et de sanction des discriminations et à renforcer ses programmes en faveur des principes de tolérance, de respect d’autrui, de réconciliation, de dialogue interculturel et interreligieux.
136. Nous notons à cet égard que la Serbie a été condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme dans l’affaire Milanović c. Serbie pour n’avoir pas prévenu les agressions répétées dont M. Milanović, membre de la communauté Hare Krishna, avait été victime, ni enquêté de manière appropriée sur ces incidents. La Cour a estimé le 14 décembre 2010 que «traiter la violence motivée par la haine religieuse de la même manière que des affaires dépourvues de telles connotations revient à ne pas tenir compte de la nature d’actes particulièrement destructeurs des droits fondamentaux» et a conclu à une violation de l'article 14 (Interdiction de la discrimination) combiné à l'article 3 (Interdiction de la torture et des traitements inhumains) de la Convention européenne des droits de l'homme 
			(93) 
			Requête
no 44614/07. La demande de renvoi devant
la Grande Chambre par la Serbie a été rejetée le 20 juin 2011..

6.2. 6.2. La situation des Roms en Serbie

137. On estime qu’il y a entre 100 000 et 500 000 Roms en Serbie. Le défaut de papiers d’identité est un problème grave et empêche les Roms d'accéder aux droits sociaux. Les Roms se heurtent à de multiples discriminations même si certains interlocuteurs ont reconnu que leur accès à l’éducation et aux soins de santé s’améliorait. On a observé des cas d'évictions forcées à Belgrade.
138. Pour l'heure, nous saluons la création, en octobre 2009, de groupes de travail chargés de la mise en œuvre de la Stratégie et du Plan d'action pour l'amélioration de la situation des Roms et d'un Conseil pour l'amélioration de la situation des Roms en charge de la mise en œuvre de la Décennie pour l’intégration des Roms 2005-2015, la publication d'un guide sur «la protection des enfants roms victimes de discrimination dans l'éducation», la poursuite de programmes d'intégration dans les écoles et les universités, l'introduction d'une discrimination positive envers les Roms 
			(94) 
			Feuille de route du
parlement, mars 2011, p.11..
139. Nous tenons à saluer les résultats concrets liés à la mise en œuvre de la Stratégie et du Plan d’action susmentionnés, dont notamment le recrutement de coordinateurs pour les questions roms dans 54 collectivités locales autonomes, de 179 assistant(e)s pédagogiques roms et de 74 femmes roms en qualité de médiatrices de santé; l’inscription, depuis 2002-2003, de 854 élèves et de 1 580 élèves du secondaire dans des institutions éducatives par application de mesures positives; le développement de mesures d’action positive avec l’inscription de 380 élèves dans le secondaire et 154 étudiants dans des universités ou des établissements d’enseignement supérieur au cours de l’année scolaire 2011-2012; l’assistance financière fournie à 176 étudiants roms à leur inscription en première année de licence; le soutien d’une campagne de sensibilisation lancée par les autorités serbes, qui a été appuyée par le Conseil national des Roms et le Bureau de l’intégration des Roms de l’Assemblée de la province de Vojvodine, afin d’encourager la participation des Roms au recensement de 2011, etc.
140. Cependant, les discriminations multiples subies par les Roms perdurent. Nous invitons les autorités serbes à mettre en œuvre les recommandations publiées le 31 mai 3011 par la Commission européenne contre le racisme et l'intolérance 
			(95) 
			CRI(2011)21.. L’obtention de documents d’identité et l’accès aux droits sociaux et aux logements continuent de poser problème.
141. Selon le Commissaire aux droits de l'homme, la non-inscription des enfants roms dans les registres d'état civil et le défaut de documents d'identité concernent environ 5% des Roms de Serbie 
			(96) 
			CommDH 007(2011).. La loi de 2009 sur l’enregistrement des naissances visait à favoriser les inscriptions au registre des naissances et contenait une disposition permettant de déclarer les naissances même après expiration du délai légal. Cependant, comme le reconnaissaient les autorités, la campagne destinée à informer les Roms des procédures d’enregistrement et d’aide juridique est insuffisante et c’est pourquoi nous saluons l’initiative du ministère des Droits de l’homme et des Minorités, de l’Administration publique et de l’Autonomie locale de lancer un appel d’offres et d’allouer une somme de 40 000 euros pour soutenir le projet d’une ONG afin d’identifier les personnes non encore inscrites sur le registre des naissances et de leur apporter une assistance juridique dans leur démarche. D’autres mesures administratives ont été mises en place pour faciliter les procédures devant les tribunaux et simplifier la délivrance des documents personnels.
142. Nous avions été heureux d’apprendre que le ministère de l’Intérieur avait rédigé le projet de loi sur la résidence et le domicile des citoyens qui propose une procédure simplifiée pour la déclaration de résidence et la délivrance de documents d’identité. Nous pensons qu’une telle loi devrait également permettre aux bénéficiaires d’avoir pleinement accès aux droits sociaux. L’adoption de la loi portant modification de la loi sur les redevances administratives de l’Etat en juillet 2011 – abolissant les redevances administratives pour les documents et actes relatifs au droit d’enregistrement subséquent sur le registre des naissances – et celle de la loi portant modification à la loi sur la carte d’identité – qui est entrée en vigueur le 4 juin 2011 et simplifie la délivrance des cartes d’identité 
			(97) 
			Selon l’article 5 de
la loi portant modification à la loi sur la carte d’identité, tout
citoyen, sans résidence officiellement déclarée sur le territoire
de la République de Serbie et pouvant prétendre à une carte d’identité,
peut en obtenir une, dans un délai de deux ans, sur présentation
d’une attestation de résidence. – devraient également faciliter le processus de déclaration des naissances.
143. Le logement et les conditions sanitaires des camps de Roms situés dans les faubourgs de Belgrade, et notamment à Gazeta et à Antena, les informations concernant les expulsions forcées ou le retour non volontaire des populations roms expulsées de Belgrade vers les villages de Serbie du sud sont préoccupantes 
			(98) 
			Voir le rapport d'Amnesty
International présenté à la Commission des Nations Unies sur la
lutte contre les discriminations raciales lors de sa 78e session
(février 2011). AI a également dénoncé en avril 2011 une recrudescence des
évictions forcées, notamment motivées par un projet de l'assemblée
de la ville de Belgrade, élaboré en 2009, qui prévoit la réalisation
de projets d'infrastructure de grande envergure. Voir <a href='http://www.amnesty.org/'>www.amnesty.org</a>, «Serbie: il faut que cessent les expulsions forcées
dont sont victimes les Roms», 7 avril 2011. et les propositions alternatives de logement semblent limitées, voire inexistantes. Dans ce cadre, il nous sera nécessaire d'obtenir des informations sur la situation actuelle à Belgrade et la mise en œuvre de la loi sur le logement social adoptée le 31 août 2009, qui prévoit l'adoption de plan d'aménagement du territoire dans plusieurs municipalités pour améliorer les conditions de logement des Roms. La révision d'une loi sur les permis de résidence permanents et temporaires était considérée comme nécessaire pour faciliter l'accès des Roms aux documents d'identité, ainsi que leur inscription dans les registres d'état civil.
144. Au cours de notre visite de septembre 2011, en coopération avec le bureau de Belgrade du HCR, nous nous sommes rendus dans des campements roms à Pancevo et à Krnjača. Nous restons préoccupés par la situation de la communauté rom, qui, malgré les mesures prises par les autorités, ne dispose toujours pas d’un accès suffisant à l’éducation, au logement et aux droits sociaux et fait face à des discriminations multiples. Aussi nous saluons l'adoption de la loi sur la résidence temporaire et permanente le 17 novembre 2011, qui devrait assurer les droits des personnes déplacées dans leur propre pays et garantir qu’elles puissent obtenir des documents d’identité, être enregistrées et exercer leurs droits sociaux et économiques.

6.3. La situation de la minorité albanaise en Serbie du Sud

145. La situation reste précaire en Serbie du Sud où le chômage et la pauvreté accélèrent les migrations internes de la minorité albanaise. Des avancées sont à noter dans cette région, avec la création d'un gouvernement local à Bujanovac en décembre 2010, et d'un Conseil national de la minorité albanaise en 2010.
146. Dans ce contexte, nous nous félicitons de l’ouverture, le 28 octobre 2011, d’un Département multiethnique d’économie à la faculté d’économie de Subotica et de la signature d’un accord de coopération avec la faculté d’économie de l’université d'Etat de Tetovo («l'ex-République yougoslave de Macédoine») afin de proposer un enseignement supérieur en deux langues. 69 étudiants, dont 40 Albanais et 29 Serbes, ont entamé leurs études le 31 octobre 2011.
147. L’instance de coordination des villes de Preševo, Bujanovac et Medvedja comprend dans sa composition élargie le ministère des Droits de l’homme et des Minorités, de l’Administration publique et de l’Autonomie locale (qui préside l’organe), six vice-présidents représentant le gouvernement et les trois municipalités, le directeur de l’instance de coordination, les maires et maires adjoints des municipalités, les présidents et vice-présidents des conseils municipaux, des membres des parlements des trois municipalités et d’autres fonctionnaires. L’instance, dans sa composition élargie, adopte sa stratégie et contrôle sa mise en œuvre.
148. La défection du président du Parti albanais pour le progrès démocratique (PDD) en juillet 2011 n'a pas affecté le fonctionnement de l'instance de coordination. Il avait déploré que toutes les demandes formulées par les Albanais (y compris une plus grande présence des Albanais dans les institutions publiques, à commencer par la police, les douanes et l'administration douanière) aient été ignorées par l'instance de coordination 
			(99) 
			B92,
Ethnic Albanian party leaves coordinating body, <a href='http://www.b92.net/'>www.b92.net</a>, 6 juillet 2011.. Le Parti pour l'action démocratique (PzDD) reste ainsi le seul parti albanais dans cette instance de coordination dont le leader – et membre du parlement – Riza Halimi avait également menacé de démissionner en raison du non-respect des principes de fonctionnement de l'instance de coordination 
			(100) 
			<a href='http://www.balkaninsight.com/'>www.balkaninsight.com</a>, «Ethnic Albanian Party May Withdraw From Coordination
Body», 6 avril 2011.. En signe de protestation, les responsables albanais ont appelé au boycott du recensement de 2011. Selon les résultats provisoires publiés par le Bureau national des statistiques, moins de 10% des citoyens des municipalités de Presevo, Bujanovac et Medvedja ont participé au recensement.
149. L’emploi est l’un des principaux sujets de préoccupation dans la région. Dans ce contexte, nous souhaiterions mentionner la campagne de promotion multilingue lancée par le ministère de l’Intérieur aux fins d’encourager les membres des minorités nationales à s’inscrire au Centre de formation de base de la police à Sremska Kamenica (COPO). Un appel a été lancé en mars 2011 pour le recrutement de 50 étudiants destinés à occuper des fonctions dans l’administration de la police de Leskovac et de Vranje (regroupant au plan territorial les commissariats de police de Preševo, Bujanovac et Medvedja). 223 candidats ont répondu à l’appel, dont 91 représentants de la minorité nationale albanaise. Le ministre de l’Intérieur a décidé de retenir 21 candidats pour l’entrée au Centre de formation de base de la police, dont 12 de nationalité albanaise, en guise de mesure positive en faveur d’une représentation proportionnelle des membres de l’ensemble des minorités nationales, conformément à la Constitution qui dispose que, concernant l’emploi dans les organes étatiques, les services publics, les organes des provinces autonomes et les collectivités locales autonomes, la composition ethnique de la population et une représentation appropriée de membres des minorités nationales doivent être prises en compte.

6.4. Mise en œuvre de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires

150. Depuis mars 2005, la Serbie est partie à la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires (STE no 148). Après ratification en février 2006, la Charte est entrée en vigueur en Serbie le 1er juin 2006. Des mesures de protection spéciale prévues dans la partie III de la Charte concernent les langues suivantes: albanais, bosniaque, bulgare, hongrois, romani, roumain, ruthène, slovaque, ukrainien et croate.
151. Les autorités serbes ont présenté en septembre 2010 le second rapport périodique sur la mise en œuvre de la Charte 
			(101) 
			MIN-LANG/PR(2010)7,
Second rapport périodique, présenté par la Serbie au Secrétaire
Général du Conseil de l’Europe conformément à l’article 15 de la
Charte européenne des langues régionales ou minoritaires (anglais uniquement).. Nous attendons la publication des conclusions du Comité d’experts de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires et en tiendrons compte dans le cadre du processus de suivi.

6.5. Conseils nationaux des minorités nationales – remarques générales

152. Nous saluons l'adoption de la loi du 31 août 2009, qui a permis la création des conseils nationaux des minorités nationales 
			(102) 
			Nous renvoyons au rapport
de M. Charles Goerens et M. Andreas Gross, Doc. 11701, section 5.78.2 sur le rôle des conseils nationaux des
minorités, paragraphes 269-277.. Les élections de ces 19 conseils le 6 juin 2010 ont été une avancée positive. Les membres des conseils nationaux des minorités nationales ont été élus au suffrage direct par 436 334 membres de 16 minorités nationales (albanaise, ashkali, bosniaque, bunjevac, bulgare, valaque, grecque, égyptienne, hongroise, allemande, rom, roumaine, ruthène, slovaque, ukrainienne et tchèque) dans 883 bureaux de vote. Trois minorités nationales (macédonienne, slovaque et croate) ont élu leur conseil national le même jour par le biais de l’assemblée électronique 
			(103) 
			MIN-LANG/PR(2010)7, op. cit..
153. Les conseils des minorités nationales endossent tous les mêmes responsabilités dans leurs domaines de compétence, en l’occurrence la culture, l’éducation (élaboration des programmes scolaires, élection des représentants des minorités aux conseils d’administration des écoles assurant un enseignement dans une langue minoritaire, etc.). Les conseils nationaux des minorités dont la langue n’est pas représentée dans le processus éducatif en République de Serbie ne peuvent dans la pratique pas exercer la plupart des responsabilités statutaires des conseils nationaux dans le domaine de l’éducation.
154. Lors de notre visite en Serbie en décembre 2010, nous avons été informés d'irrégularités et d'erreurs observées lors de ces élections en ce qui concerne la protection des données des registres, l’absence de règles claires relatives à l’enregistrement des électeurs, le rôle du ministère des Droits de l’homme et des Minorités dans la mise en place des conseils, etc. Le médiateur a confirmé qu’il avait ouvert une enquête sur ces questions. Nous avons également appris des autorités serbes que l’inscription des électeurs sur des listes électorales séparées en format électronique est confiée aux collectivités locales autonomes, conformément à l’article 51, paragraphe 2 de la loi sur les conseils nationaux des minorités nationales. L’exigence d’inscription des électeurs sur des listes électorales spéciales est prescrite par la loi sur les conseils nationaux des minorités nationales et la réglementation relative à la tenue de listes électorales séparées pour les minorités nationales.
155. Un an après les élections des conseils nationaux des minorités, nous notons que certaines personnes déplorent le manque de fonds publics alloués aux conseils, ce qui compromet la poursuite de leurs activités 
			(104) 
			M. Necak,
de l'Alliance des municipalités juives, a ainsi appelé 13 conseils
nationaux des minorités à geler leurs activités pour protester contre
le manque de fonds publics qui, selon lui, représentent moins de
10% du budget des conseils, interview à RTS Radio Belgrade, 6 juin
2011.. Après l’amendement de la législation et l’adoption de la réglementation sur l’allocation des fonds d’Etat qui ont commencé à être mis en œuvre à compter de janvier 2011, le montant alloué à chaque conseil national a été modifié. Au total, le budget alloué par la Serbie aux conseils des minorités nationales s’est élevé à 141 615 000 RSD (en 2009), 145 148 000 RSD en 2010 et 224 400 000 RSD en 2011. Une évaluation de l'action de ces conseils serait souhaitable pour améliorer le fonctionnement de ces structures.

6.6. Le Conseil national de la minorité nationale bosniaque

156. Le Conseil national de la minorité nationale bosniaque est le seul conseil des minorités à ne pas avoir été mis en place après les élections, qui se sont déroulées sur fond de divisions entre la «communauté islamique de Serbie» (conduite par Adem Zilkic) et «la communauté islamique en Serbie» (conduite par Muamer Zukorlić) qui perdurent depuis 2007 – même si, officiellement, la création du conseil national de la minorité et les dissensions entre les communautés religieuses sont des questions distinctes.
157. Trois listes se sont présentées aux élections en juin 2010. La Communauté culturelle bosniaque (dirigée par le mufti Zukorlić) a remporté 17 mandats, la Liste bosniaque (proche du ministre Uglianin) 13 et la Renaissance bosniaque (proche du ministre Ljajić) 5. Deux membres de la liste Renaissance bosniaque ont décidé de rejoindre le camp du mufti Zukorlić lors de l’assemblée constituante 
			(105) 
			L’avis de la commission
législative de l’Assemblée nationale de la République de Serbie
a été sollicité pour une interprétation de l’article 98 de la loi
sur les conseils nationaux de minorités nationales sur la question
de savoir si les mandats de ces deux membres du conseil appartiennent
aux personnes ou au parti / à la communauté..
158. Le conseil devait être formé le 7 juillet 2010. Toutefois, la veille, le ministre des Droits de l’homme et des Minorités est intervenu et a instauré une nouvelle règle, exigeant que deux tiers des membres soient présents à la session d’ouverture, au lieu de 50%. Le boycott par les listes de minorités (Liste bosniaque et Renaissance bosniaque) de la séance constitutive n’a pas permis la formation du conseil. Le ministre adjoint Antić a expliqué que les changements avaient été apportés au mode de scrutin sur le conseil bosniaque «à des fins de stabilité» 
			(106) 
			<a href='http://www.yucom.org.rs/rest.php?tip=vest&idSek=4&idSubSek=4&id=118&status=drugi'>www.yucom.org.rs/rest.php?tip=vest&idSek=4&idSubSek=4&id=118&status=drugi</a>.. Cette décision a été critiquée par la nouvelle Commissaire pour la protection de l’égalité, qui a déclaré que le changement des règles pour la formation du Conseil national de la minorité bosniaque était clairement un acte discriminatoire 
			(107) 
			DPA/Inf(2010)27..
159. La Communauté culturelle bosniaque, dirigée par le mufti Muamer Zukorlić, a formé le conseil, qui n’est toutefois pas reconnu par le ministre serbe des Droits de l’homme et des Minorités 
			(108) 
			<a href='http://www.b92.net/'>www.b92.net</a>, «EP official in Belgrade over Bosniak Council», 27
septembre 2010.. Depuis, des discussions ont été organisées par le ministre sous les auspices de l’OSCE afin de trouver un consensus pour établir un conseil avant le 6 décembre 2010, comme l’exige la loi, mais sans succès: de nouvelles élections devaient être organisées le 17 avril 2011, mais elles ont finalement été reportées, les partis en lice ne s'étant pas enregistrés dans les délais impartis. Nous regrettons que la situation soit pour l'heure bloquée. Dans l’intervalle, conformément à la loi sur les conseils nationaux des minorités nationales 
			(109) 
			L’article 137.3 de
la loi stipule que «les conseils nationaux élus avant l’entrée en
vigueur de cette loi et dont les mandats ont expiré continuent d’opérer
jusqu’à l’élection et la constitution du conseil national en vertu
des dispositions de cette loi»., le Conseil national de la minorité nationale bosniaque 
			(110) 
			Ce conseil a été élu
en vertu des dispositions de la loi sur la protection des droits
et libertés des minorités nationales à l’occasion d’une session
électronique de l’Assemblée en vue de l’élection du conseil national
le 6 septembre 2004. élu en 2004 continue d’opérer jusqu’à l’élection et à la constitution du conseil national 
			(111) 
			Commentaires de la
délégation serbe du 30 novembre 2011.. Nous invitons les autorités serbes à préparer et tenir les élections avec soin et sans délai et à faire en sorte que le Conseil national de la minorité bosniaque soit opérationnel.
160. Lors de notre visite à Novi Pazar en décembre 2010, nous avons rencontré les principaux acteurs. Nous avons été informés d’un certain nombre d’incidents, de tensions intra-ethniques et d’une radicalisation des discours qui pourraient entraîner une situation alarmante. Ces tensions ethniques ou religieuses prennent des proportions inquiétantes dans une région en récession économique, où le chômage atteint les 50% 
			(112) 
			Une «Académie
bosniaque des sciences et des arts» (BANU) a ainsi été fondée le
9 juin 2011 à Novi Pazar par les chefs des communautés musulmanes
de Serbie (M. Zukorlic) et de Bosnie-Herzégovine. La composition
de son directoire –comprenant l'ancien Président de la Bosnie-Herzégovine
Ejup Ganić (contre lequel la Serbie a lancé un mandat d’arrêt international
pour crimes de guerre) ou le Grand Mufti de Sarajevo Cerić – a suscité
de nombreuses réactions, et sa légitimité a été contestée par la
communauté scientifique en Serbie et en Bosnie-Herzégovine. Voir <a href='http://news.sciencemag.org/'>http://news.sciencemag.org/</a>.. De ce fait nous notons avec intérêt que des tentatives de rapprochement sont en cours entre les deux «communautés islamiques» à l'initiative de la Turquie, qui a dépêché dans la région une délégation en juin 2011 
			(113) 
			V.I.P., «Turkey Mediates
in Reconciliation of Islamic Communities, Zukorlic Seeks Primacy;
Zilkic: Single Islamic community should operate solely within Serbia»,
20 juin 2011.. Cependant, en dépit de l’annonce d’un accord (dont les détails n’ont pas été divulgués) aux fins de réunifier la communauté islamique de Sandzak, la situation reste bloquée, un certain nombre de questions (sièges de la future communauté islamique, rôle des actuels leaders des deux communautés) restant en suspens.
161. Nous appelons les autorités serbes à créer l’environnement requis et à promouvoir les valeurs du dialogue interreligieux, interethnique et intercommunautaire. Nous invitons instamment toutes les parties prenantes impliquées dans le règlement de cette controverse entre les deux «communautés islamiques» en concurrence à parvenir à un accord et à apaiser ces tensions qui sont préjudiciables au développement de la région. Nous encourageons par ailleurs les acteurs de la région à surmonter leurs divisions actuelles, à mettre l’accent sur le dialogue, sur une approche constructive fondée sur le respect et la tolérance mutuelle, et à défendre la souveraineté de la Serbie.
162. Nous réitérons notre ferme conviction que le développement social et économique de cette région reste la clé pour réussir la coexistence pacifique et la cohésion sociale. Nous encourageons les autorités serbes à renforcer leurs efforts dans ce sens.

6.7. Le Conseil national de la minorité valaque

163. Lors de notre visite en décembre 2010, notre attention s'est portée sur les difficultés rencontrées lors de l'élection du Conseil national de la minorité valaque. Nous avons donc rencontré les représentants des trois groupes valaques de l’est de la Serbie. La situation de la communauté valaque/roumaine en Serbie a été bien décrite dans le rapport de M. Jürgen Herrmann (Allemagne, Groupe du parti populaire européen) 
			(114) 
			Doc. 11528, La situation des minorités nationales en Vojvodine
et de la minorité ethnique roumaine en Serbie, 14 février 2008., qui a souligné que la situation des membres de cette communauté dans l’est du pays était nettement moins bonne que celle des habitants de la Vojvodine.
164. Dans sa Résolution 1632 (2008), l’Assemblée rappelle le principe énoncé à l’article 3 de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales (STE no 157) et réaffirme que toute tentative visant à imposer une identité à une personne, ou à un groupe de personnes, est inadmissible. Elle encourage les membres des minorités roumaine et valaque de l’est de la Serbie à joindre leurs efforts et à dépasser leurs désaccords internes dans leur propre intérêt afin de conserver les spécificités qui constituent leurs identités (les autorités serbes ont ici pour responsabilité de ne pas entraver mais au contraire de soutenir les initiatives en ce sens). Elle prie instamment les autorités serbes de coopérer à la fois avec l’Eglise orthodoxe serbe et avec l’Eglise orthodoxe roumaine dans la recherche d’une solution pratique visant à rendre effective la liberté de religion dans l’est de la Serbie, comme c’est déjà le cas en Vojvodine 
			(115) 
			Résolution 1632 (2008) sur la situation des minorités nationales en Vojvodine
et de la minorité ethnique roumaine en Serbie, paragraphes 19-21..
165. Une ONG, la Commission des droits de l’homme de Negotin, a mentionné les difficultés rencontrées par une partie de la communauté valaque dans l’est de la Serbie et l’interférence des principaux partis politiques dans le processus électoral. L’intimidation des électeurs, les interventions illégales dans le registre électoral, la fraude et autres violations de la loi ont été mentionnées. Ces problèmes ont été évoqués avec le médiateur au cours de notre visite en décembre 2010. Le médiateur a conclu à certaines omissions durant le processus électoral, propices à une violation du droit des citoyens à la protection de leurs informations personnelles s’agissant de l’inscription sur les listes électorales spéciales des minorités nationales. En effet, un certain nombre de citoyens ont été inscrits sur des listes spéciales sans en être avertis et contre leur gré. A la suite de la recommandation du médiateur datée du 11 février 2011, le ministre des Droits de l’homme et des Minorités a publié une Instruction sur le traitement de l’inscription des minorités nationales sur des listes électorales spéciales, stipulant que la demande d’inscription d’un membre d’une minorité nationale sur une telle liste doit être soumise personnellement ou par courrier, ce qui exclut la possibilité pour des tiers de procéder à des demandes d’inscription sur les listes spéciales. Le médiateur n’a cependant pas confirmé l’existence d’interventions illégales sur les listes électorales 
			(116) 
			Commentaires de la
délégation serbe du 30 novembre 2011..
166. Le ministre des Droits de l’homme et des Minorités a reconnu que l’identité roumaine de la communauté valaque devait faire l’objet d’une discussion et a envisagé la création d'un comité d'experts chargé d’effectuer des recherches sur la communauté valaque. Le président du nouveau Conseil national de la minorité valaque a indiqué que le conseil avait décidé de travailler sur l'harmonisation de la langue valaque, dont l'utilisation reste un sujet de désaccord. Les autorités serbes ont expliqué que la langue valaque n’est pas normalisée, d’où la non-mise en œuvre dans la pratique, pour les membres de la communauté valaque, de certains droits garantis aux minorités. Cette situation fait obstacle à l’introduction du valaque dans toutes les sphères de la vie sociale en Serbie, empêche la création du département de langue valaque et la formation d’enseignants susceptibles d’enseigner dans cette langue et entrave la mise en œuvre de ces droits, qui sont des prérequis à l’introduction du valaque comme langue officielle. Pourtant, le conseil de la minorité valaque travaille sans entrave. Il a adopté son statut, élu ses organes, organise régulièrement ses sessions et met en œuvre les activités planifiées, avec un budget de 7 282 726 RSD en 2011. 
			(117) 
			Ibid. Nous espérons qu’un compromis pragmatique puisse être trouvé au plan local afin de permettre au conseil de travailler correctement, guidé par le principe de libre auto-identification contenu à l’article 3 de la Convention-cadre.
167. Les autorités serbes ont également souligné que le recensement de 2002 montrait que la République de Serbie, sans la province autonome de Vojvodine et la ville de Belgrade, comptait au total 2 778 Roumains qui ne représentaient dans aucune des collectivités locales autonomes plus de 15% de la population. Gardant à l’esprit l’article 14.2 de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales, la langue roumaine ne remplissait pas les conditions juridiques requises pour son utilisation officielle dans les collectivités locales autonomes de la République de Serbie, à l’exception de la province autonome de Vojvodine 
			(118) 
			Ibid..
168. Nous encourageons toutes les parties concernées à promouvoir le dialogue et à rechercher les solutions pragmatiques qui permettront au Conseil national de la minorité valaque de remplir ses missions.

6.8. La situation des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres (LGBT)

169. S’agissant des droits des minorités sexuelles, nous nous réjouissons de la tenue de la Gay Pride, le 10 octobre 2010, avec le soutien des dirigeants politiques de Serbie et la pleine protection de l’Etat. Pour mémoire, en octobre 2009, la Gay Pride de Belgrade avait été annulée la veille de sa tenue, quand les autorités se sont rendu compte qu’elles ne seraient pas en mesure de protéger les participants. La parade de 2010 s’est déroulée sans heurts et sous étroite protection de la police mais, dans le même temps, des groupes d’extrémistes (quelque 6 000 membres d’organisations d’extrême droite et de groupes de hooligans supporters de football, selon la police) ont attaqué la police et des bâtiments officiels (les bureaux du Parti démocratique, du Parti socialiste et de la télévision nationale) dans divers quartiers de la ville, et vandalisé des voitures et des magasins dans le centre-ville. A l’époque, le ministre de l’Intérieur avait indiqué que des enquêtes minutieuses étaient en cours et le ministre de la Justice avait proposé des amendements au Code de procédure pénale qui avaient été adoptés par le parlement dans le cadre de la procédure d’urgence 
			(119) 
			DPA/Inf(2010)39, p.
21..
170. Lors de nos rencontres en novembre 2010, les représentants des ONG ont reconnu que l’organisation de la Gay Pride représentait une avancée importante. Ils s’étaient sentis protégés par la police. Ils pensent néanmoins que les déclarations du maire de Belgrade et du ministre de l’Intérieur, demandant d’éviter l’organisation d’une autre parade, s’adressent à une société divisée sur la question. Ils déplorent également que la nature des raisons de la violence, motivée par la haine, n’ait pas été explicitement reconnue. Ils réclament donc l’institution d’une loi sur la haine. Les ONG LGBT demandent également des lois sur les questions familiales et la reconnaissance administrative des personnes transgenres.
171. Avec le Commissaire aux droits de l'homme 
			(120) 
			CommDH 007(2011)., nous avions salué la décision de la Cour constitutionnelle de bannir une organisation extrémiste et encouragé les autorités serbes à prendre toutes les mesures nécessaires pour promouvoir une atmosphère de tolérance, poursuivre les faits de discrimination à l'encontre des personnes LGBT, y compris en assurant les conditions de sécurité de l'organisation d'une Gay Pride prévue le 2 octobre 2011 par une action concertée des autorités locales et nationales. Au cours des semaines précédant cette manifestation, les déclarations du maire de Belgrade 
			(121) 
			<a href='http://www.b92.net/'>www.b92.net</a>, «Serbia has more important problems than gay parade»,
18 août 2011. et la déclaration publiée par le Syndicat de la police serbe, indiquant ne pas avoir l'intention d'assurer la sécurité de la parade en raison des mauvaises conditions de travail 
			(122) 
			<a href='http://www.balkaninsight.com/'>www.balkaninsight.com</a>, «Serbian Police Oppose Pride Parade», 29 août 2011., étaient inquiétantes. Plusieurs actes de violence contre des membres de la communauté LGBT au cours de ces dernières semaines étaient également à déplorer 
			(123) 
			<a href='http://www.b92.net/'>www.B92.net</a>, «Gay rights group calls for prevention of violence»,
28 juillet 2011. et doivent faire l'objet de poursuites.
172. En raison des pressions exercées par un certain nombre de groupes extrémistes et de l’évaluation du risque menée par le Conseil national de sécurité, le ministre de l’Intérieur a décidé d’annuler l’organisation de la Gay Pride et toutes les autres manifestations publiques qui étaient prévues les 1er et 2 octobre 2011, soulevant ainsi un certain nombre d’inquiétudes au sein des organisations internationales 
			(124) 
			Dans une lettre publique
en date du 3 octobre 2011, le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe
Thorbjørn Jagland a demandé au Président Tadić d’expliquer les mesures
envisagées par la Serbie pour garantir la liberté de réunion et d’association
de l’ensemble des groupes sociaux, afin de lever tout doute quant
à la détermination dont font preuve les autorités serbes pour promouvoir
et renforcer efficacement les normes en matière de droits de l’homme.
Dans sa réponse à la lettre, le Président Tadić a réaffirmé le vif
soutien de la Serbie à toutes les cultures liées au sexe et au genre
ainsi qu’à la diversité, expliquant que la décision d’interdire
tout rassemblement public le 2 octobre était fondée sur des menaces
et des risques liés à la sécurité. et des membres de l'Assemblée 
			(125) 
			Voir Doc. 12750, Déclaration écrite de plusieurs membres de l’Assemblée
sur l’interdiction de la Marche des fiertés de Belgrade.. Nous pouvons comprendre que cette décision a été motivée par le risque élevé d’émeutes et de dommages humains et matériels. Cependant, nous déplorons que la liberté de réunion n’ait pu être exercée conformément à la législation, y compris la législation antidiscrimination, et invitons instamment les autorités à prendre toutes les mesures requises pour garantir la liberté de parole et d’association.
173. Nous désapprouvons également les déclarations de certains responsables politiques. Nous notons à cet égard que le Premier tribunal municipal de Belgrade a rendu le 2 novembre 2011 une décision à l’encontre du maire de Jagodina – et président du parti Serbie unie – Dragan Markovic «pour discrimination grave envers la population LGBT», à la suite d’une déclaration faite le 15 août 2011 
			(126) 
			V.I.P., 3 novembre
2011.. Nous insistons sur la responsabilité des leaders politiques dans la promotion d’une culture de tolérance et du respect des droits de l’homme.

7. Conclusions

174. Il ne fait aucun doute que la Serbie a fait des progrès notables dans de nombreux domaines et avance dans la mise en œuvre complète de ses engagements. Cependant, certaines questions clés n’ont toujours pas été résolues, ou l’ont été de manière incomplète, ou n'ont pas encore été pleinement mises en œuvre: réforme de la justice, loi électorale, lutte contre la corruption, etc.
175. Nous tenons à cet égard à souligner l'excellente coopération instituée avec les autorités serbes, comme en témoigne l'adoption, en mars 2011, d'une feuille de route par la commission des relations extérieures du parlement, visant à mesurer les accomplissements, mais aussi les progrès à réaliser, pour mettre en œuvre ses engagements et ses obligations statutaires (conformément à la Résolution 1661 (2009)). Cette feuille de route constitue un document de politique stratégique donnant la vision des autorités sur les processus clés des réformes concernant les critères qu’ils doivent suivre et les normes qu’ils doivent atteindre du point de vue de l’Assemblée, et inclut aussi un plan d’action détaillé des dispositions et mesures que les autorités envisagent de prendre pour remplir les engagements, recommandations et obligations statutaires envers le Conseil de l’Europe.
176. Nous sommes pleinement conscients du fait que l'aspiration de la Serbie à rejoindre l'Union européenne a suscité une forte mobilisation pour adopter, dans des délais serrés, de nombreuses lois, et des efforts redoublés pour remplir les conditions d'adhésion posées par l'Union européenne. A l'approche des prochaines élections législatives prévues au printemps 2012, la Serbie est dans l'expectative d'un avis positif de la Commission européenne et de l'ouverture des négociations d'adhésion à l'Union européenne. La politique d'harmonisation de la législation serbe avec les normes européennes et l'acquis communautaire découlant des conditions posées par l'Union européenne – y compris la coopération avec le TPIY et le dialogue avec Pristina – est ambitieuse et courageuse. Pour notre part, nous estimons que les efforts faits par la Serbie pour respecter ses engagements et obligations et se rapprocher des normes européennes dans le domaine des droits de l'homme, de l'Etat de droit et de la démocratie doivent être reconnus et soutenus par le Conseil de l'Europe.
177. En conclusion, nous pouvons dire que la Serbie reste sur la bonne voie et qu’elle a adopté un nombre impressionnant de lois. L'adoption d'un aussi grand nombre de lois dans des domaines fondamentaux (comme la justice) dans de courts délais est plutôt inhabituelle, et nous souhaiterions nous assurer que ce nouveau cadre législatif est opérationnel et fonctionne correctement. Aussi devrons-nous suivre la mise en œuvre de ces lois et veiller à ce que les institutions démocratiques et légales et les mécanismes nationaux de suivi soient en place.
178. Toutefois, il nous semble fondamental de nous assurer que les législations votées produisent leurs effets, et que les changements structurels requis par la transition d'un pays postyougoslave à un Etat démocratique soient ancrés. Aussi souhaitons-nous concentrer plus particulièrement notre attention sur les mécanismes visant à établir une démocratie durable fondée sur les normes du Conseil de l’Europe, notamment la réforme du système judiciaire (y compris une procédure transparente de nomination ou de reconduction des juges et l’établissement des instances juridiques supérieures), la mise en place d'un système transparent de financement des partis politiques, des médias indépendants, la révision de la loi électorale et la conformité complète des lois sur la liberté d'expression, d’association, etc., avec les normes du Conseil de l’Europe et leur mise en application intégrale.